Vendée Globe 2025 : Traumatismes, anxiété... le danger approche !
Jean de Teyssière

Lorsque les marins partent pour le Vendée Globe, ils savent que le danger sera toujours proche. Mais il l’est particulièrement lors de la traversée du Cap de Bonne-Espérance, au sud de l’Afrique du Sud. Cette jonction entre l’océan Atlantique et Indien est redoutée par les skippeurs, puisque la houle y est très forte. De quoi créer de sacrés traumatismes chez certains marins.

Si le Vendée Globe est une course en solitaire, les marins ne sont tout de même pas laissés seuls au milieu de nulle part. Une équipe médicale veille 24 heures sur 24, prête à intervenir à tout moment. Avec l’essor des foileurs, monocoques dotés de grandes « spatules » latérales, les marins vivent sans arrêt dans un shaker, car le bateau redescend brutalement sur les vagues. Ceux qui en parlent le mieux sont les skippeurs eux-mêmes, comme Pip Hare : « Il faut s’imaginer sur un cheval de rodéo qui, lorsqu’il retombe faute de vent ou qu’il percute quelque chose, vous projette violemment, comme dans un accident de la route. Quand ça va très vite, en plus d’un casque, je porte un plastron de VTT, un pantalon de football américain rembourré aux hanches et aux genoux et je planifie mes moindres déplacements pour ne pas me briser les os. » Les skippeurs arrivent sur le Cap de Bonne-Espérance et il leur faudra redoubler de vigilance.

«Une nette évolution de la traumatologie est observée»

Dans les colonnes du Monde, Laure Jacolot, urgentiste veillant sur les marins depuis dix-sept ans évoque les grands dangers de la navigation, surtout avec l’accumulation de la fatigue : « Jusqu’ici, à part de gros hématomes dus à des chutes, rien de grave, mais les réflexes des marins vont être ralentis par la dette de sommeil qui s’installe après près de trois semaines de course, et nous nous attendons à avoir davantage de traumatologie. Ces quatre dernières années, une nette évolution des pathologies et de la traumatologie est observée. Les décélérations comme les collisions avec des objets flottants engendrent des lésions plus importante. Les fractures de côtes dues à des chutes ont toujours existé mais, à grande vitesse, elles peuvent causer une souffrance du cerveau aux conséquences sérieuses sur la capacité d’attention, la fatigue et la concentration du marin à court terme et, à plus long terme, des troubles chroniques de mémoire, de régulation de l’humeur. »

Être loin des secours provoque de l’anxiété

Laure Jacolot raconte ensuite que depuis quelques années, la professionnalisation de ce sport reste un bon point pour éviter les graves blessures. Même si psychologiquement, cet éloignement peut être compliqué : « Les marins, qui se sont déjà fait peur, ont le réflexe de porter un casque. Ce n’est pas simple sur une course de trois mois, mais c’est la meilleure des préventions contre les conséquences des traumatismes. La prise en charge de la commotion cérébrale en course au large a ceci de particulier que le marin est seul maître à bord et que la réglementation ne permet pas de le mettre hors jeu s’il souhaite continuer. Même si on est encore à la préhistoire de ce qu’on peut apporter aux marins d’un point de vue médical et physiologique, la gestion de l’humain a pris de l’importance. La plupart [des concurrents du Vendée Globe] sont des sportifs de haut niveau qui se préparent physiquement, mentalement, et la prévention et la prise en charge médicale font partie à leurs yeux de l’axe de performance, au même titre que le sommeil et la gestion de l’alimentation. Outre les conditions de navigation, le manque de luminosité peut engendrer une tristesse et une lassitude réelles, même si la communication, qui s’est beaucoup améliorée, nous aide dans notre prise en charge médicale et facilite les échanges avec la famille. Se trouver à 5 ou 6 jours minimum des premiers secours potentiels crée logiquement une petite anxiété. »

Quand un marin se brise les cervicales en pleine course

Outre le fait que les infections sont très courantes à cause de l’humidité, certains skippeurs passent proche de l’irréparable. En 2023, Sébastien Simon (actuel quatrième du classement) se brise les cervicales et est victime d’une commotion cérébrale. Aujourd’hui encore, il ne sait toujours pas dans quelles conditions il a été victime de cet accident. Le seul souvenir qu’il a, c’est d’avoir « téléphoné à sa fiancée pour lui demander où il était », comme raconté pour Le Monde. Preuve en est de l’immense difficulté de cette épreuve mythique autour du globe.

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