EXCLU - WWE : «Il y a des chances que je ne puisse pas revenir...», Menacé par la retraite, Kevin Owens raconte son cauchemar
Bernard Colas -
Journaliste
Passionné de sport, de cinéma et de télévision (à l’écran comme derrière) depuis son enfance, Bernard est journaliste pour le 10 Sport depuis 2018. Plus habile clavier en main que ballon au pied, il décide de couvrir principalement un sport adulé, critiqué et détesté à la fois (le football) et un sport qui n’en est pas un (le catch).

Alors qu’il a fêté ses 41 ans le mois dernier, Kevin Owens a dû mettre sa carrière de catcheur entre parenthèses, la faute à une grave blessure au cou qui ne fut pas simple à diagnostiquer. Le Canadien a été contraint de faire l’impasse sur le dernier WrestleMania (19 avril et 20 avril 2025), le grand show de l'année à la WWE, et voit maintenant son avenir s’écrire en pointillé. Le10Sport.com a pu s’entretenir avec lui...

Cet été, les stars de la WWE retrouveront la France pour trois nouveaux shows. D’abord "Smackdown", le 29 août à la LDLC Arena de Lyon-Décines, puis "Clash in Paris", premier Premium Live Event de l’histoire de la compagnie organisé dans la capitale, le dimanche 31 août, du côté de la Paris La Défense Arena, et enfin "Raw" le lendemain, toujours dans l’enceinte située à Nanterre. Présent l’an dernier à Lyon pour l’impressionnant "Backlash", qui a permis le retour des stars du catch aussi vite dans l’Hexagone, Kevin Owens sera cette fois-ci absent. La Québécois s’est retiré des rings pour une durée indéterminée après une grave blessure au cou diagnostiquée deux semaines avant WrestleMania 41, où il devait affronter Randy Orton. Le 10 Sport a pu s’entretenir avec lui en exclusivité pour faire le point sur son état, évoquer son avenir mais également revenir sur les derniers shows de la WWE en France.

Ma première question est simple. Comment allez-vous ?

Kevin Owens : Moi, ça va bien. Je prends les jours les uns après les autres. Oui, c'est correct. Les choses sont correctes.

Avez-vous eu des nouvelles de votre blessure depuis l’annonce de votre blessure ?

Non, pas vraiment. Je n'ai toujours pas eu l'opération. Il y a plein de trucs à considérer avant l'opération. On attend un peu de voir comment les choses vont évoluer naturellement. Il n'y a aucun doute sur le fait que j'ai besoin d'une opération mais avant de faire l'opération, on doit juste voir à quel point ça peut... Non pas se rétablir parce que ça ne se rétablira pas, mais juste un peu s'améliorer sans la chirurgie. Par la suite, on va pouvoir faire un plan et décider quelle est la meilleure chose à faire pour l'opération. Mais c'est un processus très lent. Il faut juste avoir de la patience. Je n'ai pas beaucoup de patience habituellement, mais là, je n'ai pas le choix.

La patience et le moral aussi, vous l’avez gardé ?

Oui, je suis très chanceux. J'ai ma famille, ma femme, mes enfants, mes parents, et j'ai beaucoup d'amis qui sont excellents. Honnêtement, depuis que j'ai annoncé ma blessure, le nombre de personnes qui m'ont contacté pour avoir de mes nouvelles, pour m'offrir de l'aide s'ils peuvent aider… C'était vraiment assez déstabilisant. C'était extrêmement apprécié et je suis vraiment chanceux d'avoir un si bon entourage.

« Revenir ? Il y a des chances que non. Donc, j'essaie d'accepter cette possibilité également »

Vous avez annoncé votre blessure deux semaines avant WrestleMania. Quand avez-vous su que vous ne pourriez pas votre poursuivre votre carrière normalement à WWE ?

Je me doutais depuis plusieurs mois qu'il y avait quelque chose de vraiment anormal. Par contre, ça a pris plusieurs mois avant de diagnostiquer la blessure en tant que telle. Mais on l'a su deux jours avant que je fasse l'annonce à Smackdown (le 4 avril), que je ne pourrais pas être à WrestleMania et que je devais arrêter de catcher immédiatement. En fait, j'ai été extrêmement chanceux de ne pas être blessé plus sérieusement dans les combats que j'ai faits au Royal Rumble (contre Cody Rhodes) et à Elimination Chamber (contre Sami Zayn) car mon cou était déjà en très mauvais état, mais on ne savait pas. Parce que les symptômes que j'avais n'étaient pas compatibles avec une blessure au cou. Donc, on cherchait pourquoi j’avais ces symptômes, mais on ne cherchait pas à la bonne place parce que ça n'avait pas de sens. Personne n'aurait pu savoir que c'était mon cou qui était touché à cause de ces symptômes-là. Par la suite, il y a quelqu'un qui... En fait, c'est moi qui ai suggéré de faire examiner mon cou pour voir s'il y avait quelque chose là-dedans. Et c'est là qu'on l'a trouvé.

Vous aviez dit que vous saviez lors de quel match la blessure s’était vraiment réveillée, et que ce n'était pas au Royal Rumble ou à Elimination Chamber, c'était un match normal ?

Oui, je peux le dire, c’est le match contre Rey Mysterio début janvier, à Smackdown.

L’un de vos matchs de rêve d'ailleurs… Vous avez pu regarder WrestleMania à Las Vegas ?

Oui, j'étais là, oui.

Et ça n'a pas été trop dur pour vous ?

D'une certaine façon, oui, mais encore une fois, j'étais entouré de mes amis. Pendant la fin de semaine, j'étais avec ma famille. Puis pendant les shows, j'étais entouré de mes amis. Une fois que j'ai digéré… Pas le choc, mais le sentiment de « je ne peux même pas en faire partie », je me suis plus concentré à juste être présent pour mes amis et à célébrer les bons moments que mes amis allaient avoir pendant WrestleMania. Être là pour la victoire de Jey Uso, être là pour le retour de Becky Lynch, être là pour voir Iyo Sky, Rhea (Ripley) et Bianca (Belair) avoir probablement un des meilleurs matchs de l'histoire de WrestleMania, je crois que c'était absolument fantastique de pouvoir être là pour ces moments, pour des gens que j'apprécie beaucoup. C'était une belle expérience. Je suis content d'y avoir été.

Je suppose que vous avez également échangé avec Randy Orton, qui a lui aussi eu une grosse blessure à surmonter, et qui est revenu alors qu’on pensait que ça pouvait être fini ?

Oui. En fait, Randy est la première personne à qui j'ai parlé après la discussion avec les docteurs, car c'est une question de respect également. C'est avec lui que je devais avoir un match à WrestleMania. Et malgré les choses qui se sont passées durant les mois qui ont précédé WrestleMania (leur rivalité à l’écran, NDLR), il y a très peu de gens dans le monde du catch que je respecte autant que Randy Orton. Donc, je lui ai parlé immédiatement. C'est la première personne que j'ai appelé après avoir parlé au docteur. Il m'a tout de suite mis en contact avec le chirurgien qui a fait son opération, qui a sauvé sa carrière. Depuis ce temps-là, je suis en contact constant avec ce chirurgien qui évalue tous mes résultats d'examen, qui garde un œil sur tout ce qui se passe et qui me conseille au fur et à mesure. Donc, je suis très chanceux d'avoir tous les soutiens que j’ai, Randy inclus. Et maintenant, j'ai la chance de parler, non seulement à son médecin, mais aussi à beaucoup d’autres. J'ai quatre spécialistes qui sont à ma disposition et à qui je peux poser des questions quand j'en ai besoin. Donc, je suis en très bonne main. Randy m'a beaucoup aidé dans ce processus.

Au final, Randy Orton a eu un match à WrestleMania totalement différent de ce que vous auriez eu, avec Joe Henry. Il y a eu de nombreuses rumeurs sur son adversaire pour vous remplacer. Que pensez-vous du choix Joe Henry ?

Je pense que c'était le meilleur choix possible dans la mesure où le match entre moi et Randy (Orton) devait être très intense, très violent. Mais construire une histoire comme ça, ça prend du temps. Je ne pense pas que Randy aurait pu avoir ce type de combat avec quelqu'un d'autre sortant de nulle part. Ça serait dur de dire le contraire : quand les gens ont réalisé que c'était lui et que sa musique est partie, tout le public était excité, tout le monde dans le stade était heureux, tout le monde dans le stade chantait… C'était un moment spécial. Ce n’était vraiment pas le match que Randy et moi aurions eu, évidemment, mais c'était divertissant. Et puis quand on regarde tous les matchs de ce WrestleMania, je crois que c'était un match très différent du reste de la carte, je pense que c’est une bonne chose. Donc selon moi, c'était une bonne décision. J'ai bien apprécié la façon dont ça s'est passé. Et pour Joe Hendry aussi, je ne le connais pas beaucoup mais il a l'air d'un bon gars. Je ne peux pas m'imaginer à quel point ça a été spécial pour lui de vivre ça. Donc, je suis content pour lui également et j'espère que c'était son premier, mais pas son dernier.

Aujourd'hui, comment voyez-vous votre avenir dans le catch ?

J’en ai aucune idée. Je sais que je vais être impliqué pendant plusieurs années encore. En fait, je ne me vois pas ne pas être impliqué dans ce milieu. Mais tout dépendra de l'opération et comment les choses évoluent, je ne sais pas si ça va être sur le ring, hors du ring, je n'ai aucune idée. C'est sûr que je veux encore en faire partie, mais je ne peux vraiment pas dire autre chose en ce moment. Ça serait, non pas arrogant, mais faux de pouvoir vous dire en ce moment que je vais absolument revenir sur le ring, que je vais avoir d'autres combats, que je vais être capable de revenir dans le catch. Je ne sais pas si c'est vrai. Il y a des chances que non. C'est la vérité, c'est la réalité. Donc, j'essaie d'accepter cette possibilité également, mais tout ce que je sais, c'est que si jamais j'ai eu mon dernier match, c'est garanti que je vais quand même être impliqué dans le milieu du catch parce que ça a été toute ma vie et je ne me vois pas faire autre chose, honnêtement. C'est tout ce que je sais en ce moment.

Vous avez participé à Backlash, le show de la WWE qui a eu lieu à Lyon (en mai 2024) et qui a marqué les esprits un peu à la surprise générale, même des Français qui n'imaginaient pas qu'on parlerait autant d'eux. Qu'avez-vous ressenti ce soir-là à Smackdown et à Backlash ?

C'étaient des expériences fantastiques d'être dans le ring, d'avoir cette énergie-là, c'était incroyable, il n'y a aucun doute là-dessus. C'est quelque chose que tout le monde à la WWE a remarqué. Même avant que Backlash ait lieu, je savais déjà que les choses étaient en place pour avoir le show à La Défense l’an prochain (Clash in Paris, le prochain grand show de la WWE en France à la Paris La Défense Arena le 31 août 2025, NDLR), tellement le public de Smackdown a été survolté. Tout de suite, commencer à mettre les choses en place pour faire un événement encore plus important. C’était incroyable. J'ai fait une interview avant Backlash où j'ai dit que la foule était exceptionnelle mais que c'était presque trop. Je dois encore réitérer, c'est juste une question d'écouter quand il y a des entrevues sur le ring, quand les gens parlent au micro, faut juste essayer d'écouter un peu plus, c'est tout. Pendant les combats, par contre, c'était incroyable, l'énergie qu'on ressent et qu'on reçoit, c'était contagieux, quand la foule est comme ça, ça se transmet à nous.

J'ai été devant plusieurs publics très spéciaux dans ma carrière, le public me motive extrêmement. Les gens doivent se rappeler du match à Backlash, moi et Randy (Orton) contre Solo (Sikoa) et Tama (Tonga), c'était fou. C'était une vraie bataille. Je ne peux peut-être pas parler pour les autres, je peux parler pour moi et Randy, mais la réaction de la foule nous a motivés à... C'est dur à expliquer pour des gens qui n'ont jamais été dans le ring, mais il y a une montée d'adrénaline quand on est devant la foule, il y a des niveaux. Par exemple, quand la foule est comme ça, je perds complètement le contrôle mais d'une bonne façon…

Vous êtes prêt à tout leur donner…

Exact. Je veux toujours, à chaque fois que je suis sur le ring, et je suis sûr que la plupart des gens avec qui je travaille diraient la même chose, on veut toujours tout donner, mais naturellement, si la foule nous redonne l'énergie en retour, ça nous motive encore plus, c'est juste naturel. Puis Randy (Orton), je sais que pour lui, c'est une soirée très spéciale. Je l’ai constaté pendant son entrée. Je crois que la réaction du public, la façon dont ils chantaient son thème d’entrée… Il a réalisé à quel point les gens l'appréciaient. C’est assez fou de dire ça à propos de Randy Orton, ça fait très longtemps qu'il est là et c'est une légende, mais Randy Orton, lui-même, ne se considère pas comme une légende. J’en ai parlé avec Becky Lynch l'autre jour, Randy Orton ne réalise pas qui est Randy Orton. Il ne réalise pas l'impact qu’il a, et à quel point les gens l'apprécient.

Donc quand les Français se sont mis à chanter sa chanson, puis après c’est resté. Ensuite il y a eu les Allemands, maintenant les fans le font aux États-Unis… Et surtout, pendant un an et demi, il ne savait pas s'il allait pouvoir revenir dans le ring. Il pensait que sa carrière était peut-être terminée. Mais il est revenu, et il savoure la chance qu'il a d'être encore sur le ring, et le public lui montre vraiment le soutien qu’il a pour lui. C'était très spécial, et depuis ce moment, je dirais que Randy apprécie encore plus sa carrière. Je pense vraiment que ça a commencé en France l'année dernière. C'est grâce aux fans qui étaient présents à Backlash.

Vous savez que même en France, une partie des fans estiment aussi que certains fans en ont trop fait lors de Smackdown et Backlash. Des fans se sont retrouvés dans vos propos de l’année dernière...

J'ai vu des commentaires par rapport à mon propos, la plupart des gens ont compris ce que je voulais dire. Certains se sont sentis un peu insultés, mais je sais que dans leur tête, ils essaient de faire le plus possible pour que les gens se disent "wow la foule en France est vraiment folle", mais c'est juste une question de respect, car si vous n'écoutez pas quand on parle et les chants qui n'ont aucun rapport avec ce qui se passe sur le ring, si vous faites ça pendant qu'on parle, on ne peut pas s'entendre, c'est juste que ça devient une distraction au lieu d'une chose positive.

Même pendant les combats des fois... AJ (Styles) et Cody (Rhodes), c'est un bon exemple, c'est comme si le combat n'avait pas besoin d'avoir lieu, il n'y a aucune attention à ce qu'il se passe dans le ring. C'est juste "on va essayer de chanter le plus fort possible, le plus longtemps possible", mais vous pouvez faire ça n'importe où. Les deux gars qui font un combat et qui essaient de faire le meilleur combat possible, si ça n'a aucun effet sur vos réactions, pourquoi le font-ils ? Ils vont se blesser pour rien [rires]. Moi, ce que je dis, c’est qu’à 95%, c'était fantastique, c'était une expérience incroyable, mais je n'ai pas peur de dire les choses comme elles sont. Si des gens veulent s’insulter, aucun problème. Je pense que 95% des gens vont comprendre ce que je veux dire et vont être d'accord, c'est juste de la logique. Mais je l’ai toujours dit, on préfère que les gens soient survoltés comme ça, plutôt qu'ils soient tranquilles et silencieux, mais il y a une mesure à appliquer et à trouver. C’est juste la vérité, je ne peux pas le dire autrement [rires].

Vous étiez au dernier WrestleMania, vous avez donc vu la défaite de Cody Rhodes contre John Cena, marquant la fin de son règne. Pour beaucoup, la meilleure partie de son règne reste votre rivalité, et notamment votre match incroyable au Royal Rumble. Comment expliquez-vous cette alchimie entre vous deux et cette rivalité qui a très bien fonctionné ?

Je crois qu'en général, la règle d'or dans le monde du catch, c'est que plus tu as de respect pour ton adversaire, plus les combats vont être de qualité. Je crois que c'est vrai. On dirait que le respect, c'est un peu contagieux, comme les réactions du public. Si tu es dans le ring avec quelqu'un que tu respectes beaucoup, l’alchimie va être plus facile à atteindre que si tu es dans le ring contre quelqu'un que tu ne connais pas beaucoup, ou avec qui tu n'as pas beaucoup d'affinités. C'est juste normal, je crois. Moi et Cody, ça fait longtemps qu'on se connaît. À ce jour, même avec tout ce qui s'est passé (leur rivalité, NDLR), depuis que je me suis blessé, c'est probablement la personne qui se soucie le plus de mon bien-être, qui me parle le plus, qui fait tout son possible pour maintenir mon moral. Je pense que c'est ça, le respect qu'on a l’un pour l’autre, ça aide beaucoup pour l’alchimie. C'est pour cela aussi que j’ai eu d'excellents combats avec John Cena, Sami Zayn évidemment, Roman Reigns, Seth Rollins… Ça commence avec le respect, puis ensuite, je pense que les choses se développent, et l’alchimie se développe entre deux catcheurs grâce au respect. La meilleure explication, c'est le respect mutuel qu'on a entre les deux.

Propos recueillis par Bernard Colas

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