A treize jours du coup d'envoi de la Coupe du monde, le 10 Sport ouvre le débat sur les incertitudes entourant les Bleus. Après la 1ère partie sur le groupe, Thierry Henry et le choix des joueurs, place à la 2ème sur les clans chez les Bleus et le cas Gourcuff.
Y a-t-il des clans en équipe de France ? OUI Malgré l'union sacrée prônée par Raymond Domenech et les déclarations des joueurs sur l’ambiance idyllique, le monde des Bleus n'est pas celui des Bisounours. «Il n'y a pas de clan, insiste Sébastien Squillaci. On partage de bons moments, on sent un groupe ». Un discours bien rôdé (limite instrumentalisé) repris en cœur par le groupe France. Sélectionneur en tête : « Le groupe a une telle vie, une telle envie. Je sens quelque chose de très positif. Cette équipe est en train de se construire et de se faire, nous serons pas mal ». Même le départ de Diarra est po-si-ti-vé ! « Ce qui est arrivé à Lassana, à la limite, c'est quelque chose qui soude encore un peu plus les joueurs, s’émeut Domenech. Tout le monde l'a ressenti de manière très forte ». On en lâcherait presque une larmichette. Il ne faut pas avoir fait l'ENA pour trouver l'explication d'une telle mise en scène. Hanté par l'échec de l'Euro 2008 et les conflits au sein du groupe, le sélectionneur ne veut surtout pas reproduire les mêmes erreurs. Dans cette optique, il a laissé à la maison les éléments frondeurs et sélectionné des joueurs qui ne lui causeront pas de souci de gestion extra-sportive. Pas bête… Sauf que sous ces discours de façade, les clans existent bel et bien au sein de l'équipe de France. Pas au sens guerrier du terme, mais ils sont naturels. Dans toute vie de groupe, tout le monde ne peut avoir les mêmes affinités. Le staff tricolore ne cassera pas en trois semaines des réflexes qui traversent toute la société. En fonction de leur culture, de leurs origines, de leur passé commun, de leurs passions et surtout de leur personnalité, des groupes se forment. Celui des Gunners, des Bordelais, des Lyonnais, des « anciens », des gardiens... Ces clans parviendront-ils à communiquer et à placer le collectif et le challenge commun au-dessus du reste ? Il n'est pas impossible que la compétition ravive les rancœurs du passé. Que les remplaçants modèles se rebiffent, en aient marre de leur rôle de sparring-partners et souhaitent aussi prendre une part active à l’aventure. Les résultats et le jeu proposé peuvent aussi perturber le scénario rêvé, un rien fleur bleue. Sébastien Squillaci admettait « un décalage générationnel » après l'Euro 2008. Au regard de la liste des 23, il existe encore. Gourcuff a-t-il la taille « Mondial » ? NON Yoann Gourcuff est un très bon joueur. Pas encore un grand joueur. Avec Bordeaux, il a déçu cette saison. Il n'a en tout cas pas confirmé son excellente première saison bordelaise, pêchant notamment dans les derniers gestes. Malgré un bon début d'exercice et quelques éclats de génie en Ligue des Champions (notamment sur coups de pied arrêtés), le Breton a manqué de justesse technique et n'a pas su assumer le rôle de leader et de joueur décisif qui lui incombait, durant les six derniers mois. Peu de passes décisives, beaucoup moins de buts, sa responsabilité est grande dans l'échec final des Girondins. A l'inverse de la saison précédente où il avait pris une part plus que prépondérante dans la fin de saison et la conquête des titres bordelais. En équipe de France, le constat est pire. Installé par Raymond Domenech au poste de meneur, Gourcuff n'a jamais su prendre le jeu à son compte et peser sur le rendement offensif des Bleus. Le Bordelais, qui a besoin des autres pour exister, a du mal à se situer mais surtout à trouver ses partenaires avec lesquels il n'a aucun automatisme. Avec seulement deux buts en sélection, on ne peut pas dire non plus que son efficacité soit réjouissante. Pire, ses coéquipiers ne lui font pas confiance. Il a d'ailleurs été déchargé des coups de pied arrêtés. Hormis deux belles mi-temps contre la Roumanie (la seconde à l'aller et la première au retour) et le match retour en Serbie, Yoann Gourcuff n'a d'ailleurs jamais été à la hauteur. Ou du moins à celle de nos espérances. Il n'a pas encore le niveau international. Sa prestation translucide contre l'Espagne alimente le débat. Dans le mauvais sens. Pour le voir s'épanouir et rayonner en sélection, il faudrait le faire reculer d'un cran. Comme parhasard, c’était sa position lors du match retour contre la Serbie. Il avait été époustouflant. Une position plus reculée de milieu relayeur qui collerait parfaitement à ses énormes prédispositions physiques, à sa clairvoyance et sa précision dans les transmissions. Une parfaite rampe de lancement pour le jeu offensif des Bleus, capable de se projeter rapidement vers l'avant. C’est le lien entre la défense et l'attaque qui fait aujourd'hui cruellement défaut aux Bleus. Malgré l'expérience emmagasinée et ses bonnes prestations en Ligue des Champions, on se demande donc légitimement si le Breton arrivera un jour à franchir ce cap du très haut niveau. Certains, qui n'auront pas tort, avanceront l'argument de la jeunesse. Mais en deux saisons au Milan AC, le meneur de jeu bordelais n'a jamais réussi à s'imposer. Pato, lui, n'a eu besoin que d'un match (cela dit, il n’est pas au mondial…). Au Barça, Bojan a relégué Ibrahimovic sur le banc. Pedro Rodriguez a délogé Henry de sa place de titulaire et fait partie des 23 espagnols sélectionnés. Le fait que Gourcuff dispute sa première grande compétition internationale ne nous rassure pas non plus. Tout le mal qu'on lui souhaite, c'est de nous faire mentir.