La WWE en Arabie saoudite, le pire arrive
Bernard Colas -
Journaliste
Passionné de sport, de cinéma et de télévision (à l’écran comme derrière) depuis son enfance, Bernard est journaliste pour le 10 Sport depuis 2018. Plus habile clavier en main que ballon au pied, il décide de couvrir principalement un sport adulé, critiqué et détesté à la fois (le football) et un sport qui n’en est pas un (le catch).

La WWE est de retour en Arabie saoudite ce samedi (19h) pour ‘King and Queen of the Ring’, le onzième Premium Live Event de la compagnie se déroulant dans le golfe Persique depuis 2018. Des déplacements qui ont parfois donné lieu à des moments fâcheux et embarrassants que les fans préféreraient oublier…

Depuis 2018, la WWE organise plusieurs événements d’envergure du côté de l’Arabie saoudite dans le cadre d’un partenariat de dix ans, permettant à l’organisation reine du catch d’empocher environ 50 millions de dollars par show. Un rendez-vous loin de faire l’unanimité aux yeux des puristes. Déjà pour une question d’éthique alors que l’Arabie saoudite est toujours critiquée pour la question des droits de l’homme et la liberté des femmes. En 2018, la première édition de Crown Jewel avait fait polémique, celle-ci se tenant à Riyad en pleine affaire Jamal Khashoggi, du nom d’un journaliste assassiné au sein du consulat saoudien à Istanbul. La qualité des Premium Live Event proposés par la WWE est également l’un des gros points noirs relevés par les fans, alors que plusieurs des dix premiers shows saoudiens ont donné lieu à des moments que beaucoup aimeraient oublier. 

La première et dernière sur le ring de Cain Velasquez

En 2019, la WWE décide de programmer un match entre Brock Lesnar et Cain Velasquez, qui réalise par la même occasion ses débuts et qui est présenté comme une menace sérieuse pour le champion en titre. Les deux hommes se connaissent bien après un premier affrontement à l’UFC tournant à l’avantage du pratiquant de MMA. Brock Lesnar obtient sa revanche à l’issue d’un combat expéditif et brouillon de deux minutes, incitant Cain Velasquez à présenter ses excuses deux ans plus tard. « Ça m'a fait mal aussi parce que j'attends beaucoup de moi. J'attends plus de moi », confiait à MMA Hour celui qui n’a disputé qu’un match télévisé à la WWE. Sacré à WrestleMania quelques mois plus tôt, Kofi Kingston est une des victimes collatérales de ce match, son règne ayant pris fin avant Crown Jewel 2019 pour permettre à Lesnar de mettre en jeu le championnat du monde de la WWE

Ça vire à la catastrophe avec Goldberg

Goldberg dispose d’une place de choix dans les pires moments de la WWE en Arabie saoudite. En 2019, le pays du golfe Persique accueille une rencontre inédite qui aurait fait saliver l’ensemble des fans il y a une vingtaine d’années, entre d’un côté l’ancienne figure de la WCW et de l’autre The Undertaker, considéré comme l’un des plus grands catcheurs de tous les temps, mais rien ne s'est passé comme prévu entre les deux hommes, prenant part à l’un des pires combats de l’histoire de la compagnie à Super ShowDown. La faute, notamment, à une commotion cérébrale de Goldberg dès les premières secondes lorsque sa tête heurta le coin du ring. « Je me souviens que l’arbitre est venu me voir 10 ou 15 fois pendant le match, pour me demander comment ça allait. Et je lui ai répondu : ‘Je vais bien, je vais bien’. Et quand il s'éloignait, je me disais : 'Je ne sais pas ce qui se passe’, se justifia l’ancien champion du monde quelques mois plus tard dans le Pat McAfee Show. C'était une réponse différente à chaque fois et le fait est que je n'aurais jamais dû faire ce que j'ai fait. Mais je l'ai fait, j'ai essayé d'aller jusqu'au bout, mais malheureusement, cela s'est avéré être une débâcle. C'est un miracle que nous n'ayons pas tous les deux été démolis pendant ce match. » Vainqueur, l’Undertaker n’est toutefois pas passé loin du pire sur un Jackhammer mal porté par Goldberg, qui aurait pu briser la nuque de son adversaire.

Un match qui n’a pas incité la WWE à faire une croix sur Goldberg, en lice l’année suivante à Super ShowDown 2020 pour le titre Universal de l’organisation, le plus important à cette époque, contre ‘The Fiend’ Bray Wyatt. À la surprise générale, c’est bien le vétéran qui remporta la confrontation en moins de trois minutes, suscitant l’incompréhension des fans conscients que la défaite allait longtemps coller à la peau de Bray Wyatt et de son personnage. 

Le retour embarrassant de Shawn Michaels

Parti à la retraite huit années auparavant après sa défaite mémorable contre l’Undertaker à WrestleMania 26, Shawn Michaels remonta sur le ring le temps d’un soir en Arabie saoudite à l’occasion de Crown Jewel 2018. Là-encore, la WWE joue encore la carte de la nostalgie et l’affiche a de quoi attirer les nostalgiques puisque HBK retrouvait son compère de la DX, Triple H, pour faire face à l’Undertaker et Kane. Un combat de quadragénaires qui a permis de comprendre pourquoi ses protagonistes avaient ou étaient sur le point de tirer leur révérence avec un enchaînement d’actions maladroites faisant peine à voir. La déchirure au niveau d'un muscle pectoral de Triple H quelques minutes après le lancement du match n’avait rien arrangé et on comprend aujourd'hui pourquoi Shawn Michaels, qui apparaissait paradoxalement comme la légende la plus en forme (ou la moins gênante) ce jour-là regrette d’être sorti de sa retraite. « Pour moi, c’était juste une chance d’être avec les potes (…). Tout ce que je peux c’est m’excuser envers eux », déclara Michaels au New York Post en 2021, considérant cette affiche « dans un monde séparé » du reste de sa carrière à la WWE

Des (faux) enjeux à gogo 

Si le tournoi King of the Ring et sa variante féminine Queen of the Ring ont une histoire signifiante à la WWE, cela n’a pas été le cas des autres compétitions organisées en Arabie saoudite. Le premier événement est marqué par la mise en place du « plus grand » Royal Rumble de l’histoire, l’un des matches fétiches de la compagnie, qui s’exporta en avril 2018 au King Abdullah International Stadium de Djeddah. Cinquante participants prennent part à l’affiche, contre trente à l'accoutumée, pour se disputer une ceinture et un trophée sans le moindre prestige, une pâle récompense en comparaison au main event de WrestleMania promis à l’heureux élu du vrai Royal Rumble de janvier. Difficile de ne pas y voir une contrefaçon d’un classique du catch, la faute à un casting famélique et des invités décevants malgré la promesse initiale. 

La WWE s’efforça par la suite à créer de faux enjeux pour tenter d’apporter un intérêt aux shows exportés. L’édition 2018 de Crown Jewel est le théâtre de la première « Coupe du monde » de la WWE, tournoi réunissant Seth Rollins, Bobby Lashley, Jeff Hardy, Rey Mysterio, Kurt Angle, Randy Orton, Dolph Ziggler et The Miz. Aucun de ces hommes ne remportera finalement le Graal, finissant en possession de Shane McMahon après la blessure à l’écran du Miz et la défaite de Ziggler en finale. Crown Jewel 2019 proposera une « Tag Team World Cup » qui n’a plus été mentionnée depuis tandis que l’Undertaker gagnera le « prestigieux » (en reprenant le terme employée par la WWE ) Tuwaiq Mountain Trophy, tirant son nom des montagnes saoudiennes. 

Un mode de fonctionnement qui a évolué depuis l’après-Covid, alors que les derniers programmes de la WWE en Arabie Saoudite ont donné lieu à davantage de matchs divertissants, incluant désormais les talents féminins malgré une restriction vestimentaire, et moins d’affiches poussiéreuses avec des gloires d’antan. De quoi donner de l'espoir pour le rendez-vous de samedi. 

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