Depuis l'annonce de Mourad Boudjellal concernant le projet de rachat de l'OM qu'il porte, les spéculations sont nombreuses sur l'origine des fonds du Moyen-Orient évoqués par le Varois. Aux yeux de plusieurs spécialistes des pays du Golfe, l'Arabie saoudite et Mohammed ben Salmane pourraient bien avoir des vues sur le club phocéen, même si l'issue de ce dossier est loin d'être actée.
Malgré les nombreuses prises de paroles de Mourad Boudjellal concernant le projet de rachat de l'OM qu'il porte, on n'en sait pas beaucoup plus sur ce qui se cache derrière ce dossier. Seule certitude si l'on en croit les propos de l'ancien président du RCT, la présence de fonds du Moyen-Orient pour convaincre Frank McCourt de vendre le club phocéen et en assurer son fonctionnement. Rapidement cité comme étant intermédiaire dans ce dossier, Mohamed Ayachi Ajroudi est également impliqué dans ce projet de rachat, même si l'homme d'affaires à la réputation peu reluisante a indiqué depuis que son rôle était plus important. Malgré les démentis de l'OM concernant une vente future, des discussions plus approfondies devraient se tenir dans les prochains jours, mais une question principale subsiste : qui se cache réellement derrière cette opération qui fait déjà fantasmer les supporters ?
Les ambitions de l'Arabie saoudite derrière l'OM
Les rumeurs sont nombreuses quant à l'origine des fonds du Moyen-Orient évoqués par MouradBoudjellal. Aux yeux de certains spécialistes, l'Olympique de Marseille susciterait bien l'intérêt de l'Arabie saoudite, et plus particulièrement de MohammedBenSalmane, prince héritier. « Absolument que l'OM retient son attention. Le projet a été présenté. Dans les dossiers d'investissement, du public investment fund (PIF), l'OM, comme Newcastle, est sur la table. Est-ce que MBS a tranché ? L'OM a toujours été un projet de haute importance, pas comme Newcastle. Le championnat français, en termes de retombées, n'est pas le championnat britannique vu par Riyad. On sait qu'il y a plus de flexibilité en termes législatifs du côté britannique. Mais l'OM a deux atouts. Le premier est que la France a un président qui peut convaincre les Saoudiens. Quand un fonds souverain investit, c'est la meilleure des options. Le fonds est public et sous le contrôle du pouvoir politique ce qui offre une garantie. Ce n'est pas comme quand un investisseur achète un club et peut le revendre trois ans plus tard. Un financement étatique rassure tout le monde, notamment l'état français parce qu'il y aura, en parallèle, d'autres investissements souhaités par la France », explique HasniAbidi, spécialiste de la stratégie de l'Arabie Saoudite et professeur au Global Studies Institute de l'université de Genève, dans des propos accordés à Foot Mercato. Un intérêt qui s'explique alors pour plusieurs raisons majeures. Premièrement en termes d'image. Investir dans le sport est un moyen de faire parler, de diversifier ses investissements et d'améliorer la mauvaise image qu'ont certains pays du Golfe, une stratégie payante pour le Qatar avec le PSG. « Les Saoudiens sont très jaloux des différents succès du Qatar dans le monde du sport, avec ce grand symbole qu'est l'organisation de la Coupe du monde, confiait récemment sur France InfoPascalBoniface, directeur de l'Institut de relations internationales et stratégiques, et auteur de plusieurs ouvrages sur la géopolitique du sport. « Cette hypothèse de rachat s'inscrirait dans ce que font les Saoudiens depuis deux-trois ans, en investissant massivement dans le sport en hébergeant des grands événements chez eux, comme le Dakar ou la Supercoupe d'Italie », ajoute-t-il. L'idée de concurrencer le PSG en France justifierait aussi grandement cet intérêt saoudien pour l'OM. « Le Qatar a racheté le PSG il y a une dizaine d'années et ça lui a donné une formidable vitrine dont il se sert. Depuis 3 ans, l'Arabie saoudite et les Émirats sont en guerre avec le Qatar, et les Saoudiens veulent se payer un club en France pour essayer de contrer cette offensive en matière de sport, comme les Émirats arabes unis qui en ont un en Grande-Bretagne », expliquait pour sa part GeorgesMalbrunot sur RMC ce lundi soir. « C'est aussi une question d'égo de la part de ces pétromonarques, qui à travers ça également veulent mobiliser leur jeunesse. Il y a beaucoup de jeunes en Arabie saoudite qui sont des sportifs devant leur écran de télévision. Tout cela fait sens, et ils ont des moyens. Si des investisseurs saoudiens veulent venir, il y aura un accord du prince Mohamed bin Salmane qui est l'homme fort de l'Arabie saoudite », précisait le grand reporter au Figaro et spécialiste du Moyen-Orient.
Macron, Newcastle... Quelle suite dans ce dossier ?
L'Arabie saoudite va-t-elle alors concrètement se positionner pour le rachat de l'Olympique de Marseille ? Aux yeux d'Hasni Abidi, la première phase consiste à une prise de contact afin d'en savoir plus sur la situation du club : « On ne peut pas demander au futur roi de l'Arabie Saoudite de traiter avec un homme d'affaires américain (Frank McCourt). Ceux qui vont lancer des ballons d'essai, ce sont des intermédiaires. Ce ne sera pas le prince lui-même ni les deux hommes que j'ai cités plus haut (Yasir Al-Rumayyan et Yasser Almisehal, proches de MBS). Les intermédiaires vont servir à savoir si le club est à vendre et à quel prix. Il n'y a pas un mot dans les milieux sportifs en Arabie Saoudite parce que tant que Mohammed ben Salmane n'a pas montré son intérêt, personne ne dit rien. (…) Les Saoudiens consultent beaucoup. Ils peuvent confier des petites missions pour sonder le marché, le vendeur ou le public. Un acheteur sérieux comme l'Arabie Saoudite ne veut pas s'exposer dès la première heure d'une manière publique. On se préserve jusqu'à la fin d'autant que le projet est politique. » L'aspect politique sera justement déterminant pour l'avenir de l'OM, mais également de Newcastle, également visé par les Saoudiens. Le projet de reprise de l'écurie anglaise est toutefois un dossier « compliqué » comme l'a récemment admis RichardMasters, président de la PremierLeague. En effet, les prises de position d'Amnesty International et d'Hatice Cengiz, veuve de JamalKhashoggi, un journaliste saoudien assassiné fin 2018 dans le consulat d'Arabie Saoudite à Istanbul, pourraient compromettre l'issue de l'opération. De quoi jouer en faveur de l'OM ? « Le gouvernement britannique s'est exprimé clairement à ce sujet : les Saoudiens doivent se débrouiller avec la Premier League. Ça agace les hommes politiques saoudiens puisque MBS s'est prononcé dans le rachat de Newcastle. Les Saoudiens ont vu qu'il n'y avait pas un enthousiasme débordant pour leur participation », avoue HasniAbidi à Foot Mercato. Un soutien de la part de l'État français et d'Emmanuel Macron pourrait alors tout faire basculer selon le spécialiste de la stratégie de l'Arabie saoudite : « Du côté pouvoir, on attend un parrainage politique de cette prise de l'OM. L'exemple parfait : le PSG, sans Nicolas Sarkozy, il n'avait aucune chance d'avoir le soutien du père de l'émir actuel. C'est comme ça que ça fonctionne du côté du Golfe. Ils investissent, mais il leur faut un accompagnement politique. On est dans une dualité importante : le président français n'est pas contre une présence saoudienne à Marseille. MBS n'est pas contre, au contraire, mais je ne connais pas les coulisses entre les deux, que le club de l'OM soit une demande du pays et pas uniquement un business entre un Américain et un Saoudien. » Les zones d'ombre sont encore nombreuses, et il faudra se montrer patient pour en savoir plus sur ce qui pourrait attendre l'Olympique de Marseille.