EDF : Faut-il finalement aller presser l’Espagne ?
La rédaction

La question de la semaine en football est simple : comment battre l’Espagne ? Un problème insoluble depuis 6 ans. Avec en toile de fond la peur de prendre une volée mardi soir, à Vicente Calderon.

Se recroqueviller ou avoir le panache de bousculer les Espagnols, telles sont les options des Bleus face à l’ogre du football mondial. Si Didier Deschamps est un adepte du bloc bas et compact, des contradicteurs prestigieux voient les choses différemment.

Verrouiller derrière, mais à quoi bon ?

Nul n’a trouvé la bonne solution pour faire tomber l’Espagne. Cette équipe qui confisque le ballon, fait tourner en bourrique l’adversaire, le fatigue, et le plante tel un toréador. Alors que faire ? La dernière équipe à avoir battu la Roja en match officiel est la Suisse au Mondial 2010. Stephan Lichteiner, défenseur helvète présent ce jour-là, confirme dans les colonnes du Parisien que la tactique choisie avait été très frileuse. « On avait évolué bas, dans un 4-5-1 très regroupé et compact. » Didier Deschamps semble se diriger vers ce genre de schéma, étant donné les absences de Mavuba et Diaby, et vu les stratégies qu’il a toujours privilégiées avec l’OM lors des gros matchs de Ligue des Champions. Un milieu de terrain costaud (Capoue, Matuidi ou Sissoko et Cabaye), pour courir et colmater les intervalles, et des latéraux priés de ne pas trop s’aventurer dans le camp adverse. Mais si les Suisses ont réussi à gratter un succès dans un match de poule, sur un but improbable (un cafouillage dans les 16 mètres), ils font figure d’exception. La Géorgie a failli obtenir le nul, mais au prix d’une défense à 11 dans ses 20 mètres, et un but espagnol est comme d’habitude venu punir l’adversaire. Dans ce cas, si le foot est devenu un sport qui se joue à 11 contre 11 et où l’Espagne gagne à la fin, pourquoi ne pas mourir les armes à la main ? Tenter d’avoir du panache, quitte à perdre comme l’Italie en finale de l’Euro. Une Italie qui en poule avait obtenu le nul en jouant en 3-5-2, en pressant haut, avec un milieu technique (Pirlo, Marchisio, Motta). Les tenants de ce choix « agressif » sont nombreux, et ne sont pas n’importe qui.

Les spécialistes en faveur de l’ambition

Expert es-Espagne, Reynald Denoueix livre son avis sur les solutions pour contrer la Roja dans les pages du Parisien-Aujourd’huien France. Il est partisan d’un jeu plus ambitieux qu’une attente, regroupé dans sa moitié de terrain. « L’Espagne est une formation très forte, il ne faut surtout pas lui laisser le monopole du ballon, analyse le champion de France 2001 avec Nantes. Alors ne subissons pas trop, il faut tenter d’exercer un pressing afin de les faire douter. » Le mot est lâché, presser les orfèvres ibériques, les empêcher de faire tourner tranquillement le ballon et les obliger à se précipiter. Le but ici est de récupérer le ballon très haut pour lancer les flèches offensives tricolores (Ribéry, Benzema, Ménez…). Des attaquants qui seraient inopérants en cas de récupération à 70 mètres des buts de Casillas. Le meilleur exemple est le dernier quart de finale de l’Euro. Laurent Blanc avait opté pour une frilosité extrême avec notamment deux arrières droits. Au final, une catastrophe tant les Bleus ont été stériles.

Luis Fernandez, fin connaisseur de la Liga, livre la même analyse dans le quotidien. « Le principal est de couper les Espagnols à la source, martèle l’ex-coach de Bilbao. J’ai une certitude, c’est que si on recul, on est mort. L’idée est de rentrer sur la pelouse avec l’ambition de les faire douter chaque minute. » Ambition, un mot presque tabou dans un climat de crainte extrême face à cet ogre. Une crainte que ne partagent donc pas les habitués de la Liga, et parmi eux, Zinedine Zidane. Dans un entretien accordé à L’Equipe, Zizou confirme cette nécessité de bousculer les champions en titre. « Sincèrement, pour moi, l’Espagne est une équipe qu’il faut aller chercher, en fait. Conseille le Ballon d’Or. Elle peut être en difficulté si tu la presses. » Une opinion qui vient en écho de la presse espagnole, qui craint le défi physique français. Mais pour imposer ce défi, il faudra avancer, et non pas reculer. « Au bout d’un moment, dans l’attaque-défense, l’attaque prend le dessus, parce qu’il est bien plus difficile de courir derrière le ballon que de courir avec le ballon. » Une évidence que relève Zidane, persuadé néanmoins que Deschamps ne prendra pas ce chemin (« Didier a dit qu’il fallait prendre l’autre option »). Quel que soit le choix, une seule chose est sûre, il faudra un exploit pour perturber la marche en avant d’une équipe de légende.

Par Ryad Ouslimani.