EXCLU - XV de France - Éric Champ : «C’est la meilleure génération qu'on ait jamais eu»
Romain Amalric -
Journaliste
Journaliste depuis 20 ans, je suis homme de terrain de Canal+ sur le Top 14 et la ProD2 et correspondant pour Radio France

A quelques jours du début de la Coupe du monde en France, Eric Champ, ancien troisième-ligne du RC Toulon et des Bleus (42 sélections) ne cache pas son impatience. Et il reste persuadé que, même sans Romain Ntamack, le XV de France est encore le grand favori pour gagner.

Éric, la Coupe du monde approche à grands pas. Il doit vous tarder…
Oui il me tarde. Parce que c’est un grand événement, qu’on attend tous. Et que la France est une des seules grandes nations du rugby qui n’a pas encore de titre mondial. Et avec la génération que l’on a, j’espère fortement que c’est pour cette année.

Est-ce la meilleure équipe de France qu’on ait jamais eu avant un Mondial ?
Oui, je le pense. C’est une grande équipe qui peut être championne du monde. Comme dans toutes générations de Bleus, Il y a dans cette équipe des soldats qui sont les meilleurs à leur poste. Et auxquels tu ajoutes deux ou trois joueurs d’exception. Pour cette génération aussi c’est le cas. A chaque poste, il y a des joueurs qui sont des références mondiales. Et il y a deux ou trois joueurs comme Dupont, Penaud, Alldritt ou Ollivon qui sont des grands joueurs d’exception. Et ce qui est intéressant, c’est qu’à chaque poste, on a au moins un bon remplaçant. Et en disant ça, j’ai bien sûr une pensée pour le drame psychologique que doit vivre Romain Ntamack. Parce que cela devait être son année, avec le titre de champion de France et peut-être de champion du monde. Moi je pense avoir fait partie d’une génération avec beaucoup de talents. Mais celle-ci, incontestablement, c’est la plus grande génération que n’a jamais eu notre pays.

«Il y a ces mecs qui transforment le ballon en or massif...»

L’absence de Romain Ntamack n’altère pas notre position de favori ?
Oui et non. Oui, parce que Romain, c’est un très grand joueur. On l’a vu en finale du Top 14. On pouvait se dire qu’il passait à côté de sa finale. Et puis, à un moment donné, il a un éclair de génie, et il te fait basculer le match. Et on sera champion du monde parce qu’un de nos joueurs aura aussi un éclair de génie et va le transformer en gain du match. J’ai vécu tellement de fois cela avec Serge Blanco ou avec Philippe Sella. C’est tendu, et puis boom ! Il y a ces mecs qui transforment le ballon en or massif et qui vont le mettre derrière les bois. Mais on a tellement de joueurs… Le petit Jalibert, le petit Hastoy, Ramos aussi qui est un joueur de grande classe. Tout cela fait que, oui l’absence de Romain Ntamack est embêtante, surtout pour lui. Malgré ça, l’équipe de France reste, à mon sens, la grande favorite de cette Coupe du monde.

Sans compter Antoine Dupont, qui est devenu un joueur hors normes. Que pensez-vous du capitaine des Bleus ?
Oui. Antoine Dupont, il est hors normes. Moi je pense que depuis Gareth Edwards du temps des Diables Rouges gallois des années 70, on n’a pas vu un demi-de-mêlée avec autant de talent. C’est rare. C’est comme Serge Blanco. Il a beaucoup de talent. Et après il y a des grandes compétitions comme celle-là durant laquelle les joueurs immenses doivent tracter et nous délivrer.

«Les Springboks ne seront pas invités»

La France est donc favorite, mais il y a d’autres nations qui prétendre au titre. De qui faut-il se méfier ?
C’est la magie de ce genre de compétition. C’est le jeu des phases finales. Les phases finales mettent parfois les mathématiques en défaut. Aujourd’hui, si on fait des calculs mathématiques, c’est surement l’Irlande, ou probablement la France, qui sera championne du monde. Mais à côté de ça, quand on regarde la télé depuis un mois et demi, et qu’on regarde jouer les All-Blacks, on se dit : « Ouhlala, qu’est qu'il se passe ? ». Je pense néanmoins que les Springboks ne seront pas invités. Parce que j’ai rarement vu une équipe sud-af si faible en troisième-ligne. Ils sont en défaut de numéro 8. Je pense que l’Irlande, à la différence de nous, a un très gros collectif, mais ils n’ont pas un groupe aussi étoffé que le nôtre. Et pour aller au bout d’une Coupe du monde, ce n’est pas quinze joueurs qu’il faut, c’est beaucoup plus que ça. Le danger, ce serait de prendre les Springboks en quart, et d’y laisser des plumes. Parce que les Springboks, tu peux les battre, mais c’est tellement dur.

Que pensez-vous du travail du staff actuel du XV de France ?
Je pense qu’on s’est donné les moyens en termes de staff. Très clairement. Ce sont des gens compétents et intelligents. Depuis qu’ils ont pris l’équipe, ils ont compris assez rapidement que l’objectif à atteindre c’était d’être champion du monde. Tout me semble bien construit. Je les trouve eux-aussi très concentrés, et arque boutés sur le sujet. Je le ressens. Et je ne dis ça pour cirer les pompes. Je m’en balance. Mais on a tellement vécu des passages avec des gens qui avaient beaucoup moins de compétences…

A quelques jours du début de la compétition, sentez-vous montez l’engouement autour de la Coupe du monde et de l’équipe de France ?
L’engouement en France pour le rugby existe depuis longtemps. On a passé une période où malheureusement on gagnait peu ou pas. Les gens sont versatiles. Quand tu gagnes c’est "cocorico" et quand ça perd on te jette des pierres. Je pense que les stades seront pleins, et tout ça, c’est aussi parce que depuis trois ou quatre ans, tu gagnes. L’an dernier, on est invaincus et on gagne le Tournoi. Cette année on met 40 points aux Anglais… Tout ça, ce sont des signaux qui comptent, même pour les gens qui ne sont pas des spécialistes de rugby. Les gens se disent qu’il se passe quelque chose. Et puis le rugby c’est une fête populaire, une fête pour les gens formidables. Je ne veux pas me risquer à des comparaisons abusives mais nous on n'a pas besoin de mettre des policiers dans les stades. Les Sud-africains feront la fête avec les Irlandais, les Anglais avec les Argentins. Il n’y a pas d’embrouilles. C’est la magie de notre sport. L’embrouille elle est sur le terrain. Nous, on s’explique sur le terrain.

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