Voltige en planeur : Un Français sur le toit du monde!
Alexis Bernard -
Rédacteur en chef
Footballeur presque raté, j’ai choisi le journalisme car c’est l’unique profession qui permet de critiquer ceux qui ont réussi. Après avoir réalisé mon rêve de disputer la Coupe du Monde 2010 (en tribune de presse), je vis de ma passion avec le mercato et les grands événements sportifs comme deuxième famille.

La France compte dans ses rangs un nouveau champion du monde en la personne de Thibaut Fromantin. Sa spécialité : la voltige en planeur. Une discipline qui embarque sensations fortes, techniques et poésie. Une passion qu’il partage en nous livrant tous ses secrets.

En avril 2015, Thibaut Fromantin n’a jamais mis les pieds dans un planeur de toute sa vie. Mais lorsqu’on lui propose de regarder, et même d’essayer, à l’aéroclub de Mantes-Chérence dans le Val d’Oise, ce curieux de nature se laisse prendre au jeu pour un vol d’initiation improvisé : « Je n’avais absolument aucune expérience de vol avant cela, confesse-t-il. J’ai trouvé cela très accessible et super amusant. Pour les moins de 25 ans, on peut voler en illimité toute l’année pour moins de 1 000 euros ! Après 25 ans, c’est un peu plus cher, autour de 2 000 euros par an, avec la même possibilité de voler quand on le souhaite ». Piqué au cœur, Thibaut Fromantin devient rapidement un mordu de la discipline et, un an plus tard un as des figures aériennes. Un an seulement après ses débuts dans la voltige en planeur, le voilà déjà sur la plus haute-marche d’un podium de Coupe de France Espoir. Carrière lancée, le Tourangeau se prend à rêver d’un sacre mondial et part en quête. 

2023, la consécration

En 2021, Thibaut Fromantin signe son premier exploit international. Une médaille de bronze aux championnats du monde dans la catégorie Advanced. L’année suivante, il grimpe d’une marche, s’offre l’argent et passe tout près d’un titre mondial. Un Graal qu’il vient d’atteindre, début août, dans les airs de Torun, en Pologne. La troisième participation aux championnats du Monde est la bonne pour ce passionné devenu la locomotive tricolore de la discipline : « Ce titre de champion du monde, c’est le fruit du travail et de la persévérance (sourire). Ça peut paraître simple mais c’est la vérité. J’ai continué d’y croire et de m’entraîner, même si je n’ai pas pu beaucoup voler. J’ai concentré mon travail sur la qualité plutôt que la quantité puisqu’en moyenne, la dose de vol d’un pilote se situe entre 50 et 60 vols par saison, 80 à 90 pour les plus acharnés. Je n’ai pu en faire que 25. Entre vie personnelle et professionnelle chargée, une blessure au coude qui a duré quelques temps et une avarie majeure sur le planeur de l’équipe de France, il a fallu s’organiser différemment ». 

Jusqu’à 9 G à encaisser !

Pour construire son titre mondial, Thibaut Fromantin a donc dû organiser sa vie et son quotidien pour se rapprocher de celui des sportifs de haut-niveau. Car en voltige, impossible d’envisager de vivre de la discipline : « Par manque de visibilité, de médiatisation et donc de sponsor, c’est difficile d’envisager de gagner sa vie en ne faisant que ça ». Pourtant, le programme des meilleurs du circuit s’apparente clairement à celui des sportifs de haut-niveau. Et sans rigueur, préparation ni entraînement, les performances ne peuvent être au rendez-vous. Thibaut Fromantin détaille les contours de son quotidien et les clés de sa réussite : « Quand on ne vole pas, il y a un gros travail au sol, en deux parties. La première, c’est tout ce qui concerne le physique. On est sur un régime alimentaire et des exercices de renforcement, principalement. Un régime alimentaire pour garder un poids constant. Le planeur réagit différemment en fonction de votre poids donc il faut pouvoir conserver le même tout au long de la saison. Si je fais 80 kg au début de la saison et que je me lâche un peu en mangeant pizza, alcool, etc, je peux vite arriver à 85 kg en fin de saison et ça n’est plus du tout pareil pour piloter. Pour le renforcement, ça concerne principalement le cou et les abdos. Quand on vole, le corps subit des accélérations importantes, qui peuvent aller jusqu’à 9 G. Il faut pouvoir supporter 9 fois le poids de son corps. L’autre partie concerne la préparation mentale. Elle est primordiale. C’est le nerf de la guerre, la clé de la réussite. Je pense que c’est environ 60% du travail. Il faut être capable de visualiser les moindres paramètres du vol en amont afin d’être en ‘pilotage automatique’ lors de l’épreuve. La prépa mentale permet de se libérer d’une charge pendant le vol et de mieux gérer les imprévus en l’air. Je connais mes figures, les vitesses, les niveaux d’altitude intermédiaires, je peux donc être plus lucide et concentré sur ma position dans le box par exemple, l’espace d’un kilomètre cube dans lequel le planeur évolue et où les juges nous notent ».

La catégorie Unlimited dans le viseur

Une compétition de voltige en planeur se joue sur trois vols minimums. Si les conditions météos le permettent, cela peut monter jusqu’à six vols. Des sessions durant lesquelles les pilotes effectuent plusieurs types de programme. Un programme connu, que ces as des airs connaissent et répètent tout au long de l’année. Des chorégraphies qu’ils ont eux même « dessinées ». Et un programme inconnu, avec des figures qu’ils connaissent tous mais dont l’enchaînement change en fonction des compétitions. Une discipline dans laquelle la France a su briller par 4 fois depuis 13 ans et l’organisation des premières épreuves. En Advanced, catégorie dans laquelle les juges s’attardent sur la précision et les trajectoires du pilotage, comme en Unlimited, qui propose des figures plus techniques, les talents tricolores sont très souvent au rendez-vous. Et pour Thibaut Fromantin, titré en Advanced, il est temps d’envisager un changement de catégorie : « J’ai envie de passer à autre chose. Peut-être pas la saison prochaine, mais celle d’après, j’irai sûrement en Unlimited ». Avec l’objectif d’écrire l’histoire et d’être sacré champion du monde dans les deux catégories, ce qu’aucun pilote n’a jamais réalisé.

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