Perle du football français depuis son plus jeune âge, Rafik Guitane a vu ses débuts dans le monde professionnel marqués par plusieurs blessures. A 22 ans, le milieu de terrain retrouve enfin le sourire du côté du Maritimo, où il est prêté pour la deuxième saison consécutive. Armé d’un mental d’acier, le Rémois affine les réglages de son retour au plus haut-niveau avec le rêve de pouvoir enfin casser la baraque en Ligue 1. Interview.
Bonjour Rafik ! C’est un plaisir de t’avoir sur le10sport.com. Pour commencer, est-ce que tu peux nous raconter ton mercato estival, ce transfert de Rennes à Reims, puis ce nouveau prêt au Maritimo ? Après une bonne fin de saison au Maritimo, je suis retourné à Rennes, pour faire la préparation estivale. Je pensais rester, reprendre avec le groupe et tenter de m’imposer. Il y avait un nouveau coach, un nouveau président, j’espérais avoir une chance de pouvoir montrer ce que je peux faire et poursuivre mon histoire avec Rennes. Mais on m’a fait comprendre que non, en m’intégrant dans le loft des joueurs qu’on souhaite voir partir. Rapidement, il y a eu des discussions entre des clubs et mes représentants (KDS Football Management). Et quand Reims est arrivé, j’ai naturellement été tenté, attiré. J’ai dit oui tout de suite (sourire). Pourquoi naturel ? Qu’est-ce qui te séduit à Reims ? C’est un club avec de l’ambition et qui fait confiance aux jeunes. J’aime l’état d’esprit, l’histoire et les intentions. C’est un club qui me correspond et dans lequel je pense pouvoir m’épanouir ces prochaines années. En attendant, je poursuis mon chemin, mon apprentissage, au Maritimo. Et j’en suis très content. Revenir au Maritimo aussi, c’était naturel ? C’est venu rapidement dans les discussions avec Reims que de repartir sur un prêt ? Oui, on en a parlé dès le début. C’était une opportunité et c’était facile de poursuivre ici. Ça n’a pas été simple au départ car je n’avais jamais quitté la France. Je ne connaissais pas cette île, je ne connaissais personne là-bas et je ne parlais pas la langue. Il a fallu s’adapter ! Mais avec le temps, j’ai réussi à trouver un équilibre et j’ai pu enfin faire une bonne saison. Pour la première fois depuis que je suis professionnel, j’ai pu jouer 25-26 matchs et parvenir à être performant. Ça fait du bien !
« C’est top de pouvoir briller quand tout va bien. Ça l’est beaucoup plus quand il y a des obstacles à surmonter »
Il est clair que tu n’as pas été épargné par les blessures depuis tes débuts… Au point de douter, de se dire que tu pourrais « arrêter » ? Je ne te cache pas qu’au début, sur ma première blessure, au Havre, ça été difficile. Les ligaments croisés, quand tu démarres dans le monde professionnel, il faut être solide. Je ne m’étais jamais blessé comme ça, je ne connaissais pas. Mais je pense que ça m’a vraiment endurci. J’ai dû apprendre, physiquement et mentalement, à franchir des étapes difficiles. Ça m’a forgé, ça m’a donné une force de caractère que j’ai encore aujourd’hui. Une force qui m’a permise, je pense, d’affronter ma deuxième rupture des ligaments croisés, à mon arrivée à Rennes. Je venais de signer, ça m’a clairement brisé dans mon élan et le rythme que je recommençais à trouver. Ça été difficile à accepter mais encore une fois, je me suis battu pour revenir, pour prendre en masse musculaire. Dès fois, ça m’est arrivé de craquer, bien sûr. Quand tu vois tes coéquipiers s’entraîner et que toi, tu as juste le droit de courir, faut être costaud. A défaut d’avoir encore pu prouver sur le terrain les espoirs placés en toi, tu fais preuve d’une force mentale hors du commun pour revenir à chaque fois. C’est aussi ça, être un champion. Pouvoir se relever chaque fois qu’on tombe, non ? Je suis totalement d’accord… C’est top de pouvoir briller quand tout va bien. Ça l’est beaucoup plus quand il y a des obstacles à surmonter, des montages à soulever. Dans chaque blessure, il y a un défi à relever. Et il y a de quoi apprendre, de quoi se forger un mental pour être en capacité de tout affronter ensuite. Quand tu entends certaines personnes te dire que ça arrive de ne jamais se remettre d’une rupture des ligaments croisés… Il faut être solide. Il faut être entouré. Tu as très peu joué avec le Stade Rennais, finalement. Qu’est-ce que tu retiens de cette expérience ? Est-ce tu ne ressens pas une certaine frustration ? J’ai beaucoup appris durant cette période. Comme je te l’ai dit, les blessures m’ont beaucoup appris et m’ont permis de me construire. Ce n’est pas du temps de perdu, c’est un apprentissage. Difficile, douloureux, parfois. Mais j’ai appris beaucoup de choses sur moi, sur le haut-niveau. Est-ce que j’ai mis tous les ingrédients, est-ce que j’ai fait des erreurs ? C’est possible, je ne sais pas. Qui ne fait pas d’erreur ? C’est en se trompant qu’on apprend. Qui peut dire que c’est mon hygiène de vie qui est à l’origine de ma blessure aux ligaments croisés ? Je retiens juste que j’ai appris et mis des choses en place depuis mes blessures. Je suis beaucoup plus à l’écoute de mon corps et dès que je ressens quelque chose, de suite, je mets en place des choses. J’ai mal à tel endroit, je ne me pose pas de question : kiné (rire). Dans chaque expérience, dans chaque épreuve, il y a de quoi puiser des enseignements. C’est mon cas.
« Jouer contre ses propres idoles, c’est une chance incroyable… »
Depuis très jeune, tu es le joueur que l’on remarque, celui qui fait la différence, celui qui apporte ce petit grain de folie. C’est un poids, une responsabilité supplémentaire, de savoir qu’on attend plus de toi, que les gens qui te regardent jouer attendent forcément un « truc en plus » ? C’est sûr que ça fait plaisir d’entendre du bien sur toi, sur ce que tu fais, ce que tu proposes. Mais je ne réfléchis pas « comme ça ». Je ne cherche pas à faire des choses juste parce que les gens attendent un truc en particulier de moi. Je joue naturellement, comme je le ressens. J’essaye d’être pleinement moi-même. Après, j’ai encore beaucoup de défauts (sourire). Des choses que j’essaye de corriger, d’améliorer. Et aujourd’hui, ma priorité, c’est vraiment d’être régulier. J’ai vraiment kiffé la saison dernière car c’est la première où j’ai pu jouer, enchaîner et trouver cet équilibre. Alors oui, j’ai envie d’être le Rafik Guitane qui fait la différence, etc… Mais avant tout, je veux jouer. Et si je suis revenu au Maritimo, c’est pour continuer sur ma lancée et confirmer ce que j’ai commencé à faire ici. Dans ton plan de vol, il y a terminer le travail au Maritimo et ensuite débarquer à Reims pour « tout casser », en Ligue 1 ? Continuer à jouer avec Maritimo et montrer ce que je sais faire. Je pense que je n’ai pas tout montré encore, j’ai encore à prouver, notamment en jouant, en enchaînant. Ensuite, oui, il y aura Reims. C’est réellement un objectif : revenir en France et jouer en Ligue 1, ce dont tous les joueurs français rêvent. Je n’ai pas eu l’opportunité de vivre ce rêve avec Rennes, j’espère avoir l’opportunité de le réaliser avec Reims. Et croiser le chemin de stars, qui sont aussi tes idoles, comme Neymar, comme Messi… Même s’ils n’étaient pas en Ligue 1, j’aurai quand même la motivation et l’envie d’y jouer (sourire). Après, c’est sûr que c’est un plus s’ils sont là. Ce sont des joueurs qui ont marqué l’histoire du foot, dans les grandes lignes. Jouer contre ses propres idoles, c’est une chance incroyable… On verra si on peut venir concurrencer tout ce petit monde (rire). En attendant, tu t’aventures sur les terres de Cristiano Ronaldo, une autre de tes idoles. A Madère, tu confirmes, c’est CR7 matin, midi et soir ? Ah c’est partout et tout le temps… C’est un Dieu vivant ici ! Il a très peu joué ici, au Nacional, mais c’est l’idole de toute l’île. Il est présent à tous les coins de rue, c’est quelque chose d’impressionnant. Mais bon, ce n’est pas n’importe qui. C’est Cristiano Ronaldo !