Après la sortie médiatique de Bernard Tapie la semaine dernière, voici la réponse de Christophe Bouchet, ancien président de l’OM.
La défaite de l’OM face au Bayern (0-2) et la mauvaise série actuelle montre-t-elle les limites de cette équipe marseillaise ?
Face au Bayern, on a vu une équipe qui a abdiqué. C’est toujours compliqué quand une équipe abdique psychologiquement. Il y a surtout plein de travers qui se sont mis en place tout le long de la saison. Elle est partie de travers… Ce qui est certainement la résultante d’erreurs un peu plus ancienne.
Lesquelles ?
Il y a eu une politique de recrutement durant les deux dernières années qui n’a pas été la bonne. Lucho et Gignac n’ont pas été la hauteur sportivement. Et puis même quand les joueurs sont au rendez-vous sportif, comme Loïc Rémy, les montants qui ont été investis n’ont pas été les bons !
C’était dû à un manque de connaissance du milieu du président Jean-Claude Dassier ?
Il y a eu une rupture avec l’ère Bouchet-Diouf. Avec nous, il y a eu une continuité dans la construction et dans le recrutement. Cette rupture était sûrement nécessaire mais pas assez préparée sur le plan sportif et organisation du club. Ça manquait certainement de projet sur le long terme. Aujourd’hui, l’OM paye l’ère Dassier.
Vous pensez que M. Dassier n’a pas su anticiper l’avenir?
Quand on met quelqu’un qui est à la retraite, il ne faut pas s’étonner qu’il fasse de la fin de carrière professionnelle. Quelqu’un qui a autour de 69 ans ne va penser qu’à l’année qui va suivre. Mais quand on ne bâtit pas l’avenir, on ne bâtit pas le présent. C’est une certitude absolue. Il y avait une double dynamique Dassier-Deschamps qui avait besoin de succès immédiat… Maintenant à quel prix ? C’est ce qu’on paye aujourd’hui.
Que Didier Deschamps ait une version à court terme, ce n’est pas handicapant pour le groupe ?
C’est logique qu’il ait une vision à court terme. C’est un entraîneur ! Elle devrait être compensée par une vision à long terme à la direction. Aujourd’hui, pour diverses raisons que je ne connais pas, elle n’est pas compensée. On sent une fébrilité sur qui va assurer la continuité ? Il y a des gens qui pensent à différents horizons… et il y a conflits entre ces gens-là. Quand la locomotive ne parle pas avec les wagons, c’est toujours compliqué.
Bernard Tapie vous a qualifié de président « fantoche » la semaine dernière dans la presse... Ça me fait rire ! Il dit qu’un président de club ait eu une vie admirable et qu'il mette de la « thune » comme il dit. Je n’aurais pas la cruauté de rappeler à M. Tapie ce qu'il y a eu d'admirable dans sa vie. Je vais juste rappeler que lorsque je suis arrivé à l’OM en 2002, le club était 9e ! Il y avait 38 millions d'euros de déficit. Il y avait eu 58 mouvements dont Eduardo Tuzzio, Claudio Gentile, j'en passe et des meilleures. Et qu'il n'avait pas mis 1 euro dans le système. Tapie est un mariole amnésique. L'autre fois, je l'ai entendu dire de Hollande qu'il était un cake... Au moins on sait qu’il en connaît la définition.
Dans la mémoire des supporters, c'est le Tapie d'avant 93... Ils ont une vision à la surface... Ce qui est logique. Pourtant Tapie s'est plus servi du football qu'il ne l’a servi. Oui, il y a eu des titres à l’OM entre 1987 et 1993, oui il y a eu une grande équipe. Mais en 1994, il a laissé le club à genoux. Et quand je dis à genoux... Il ne lui restait quasiment que les tibias. À force de traîner dans les jardins pour enterrer l'argent... On s'abîme les genoux.
Vous êtes proche de Jean-Louis Borloo, tout comme l'est Bernard Tapie. Il n'a jamais tenté de vous réconcilier ? Non, même pas. Il n'a pas essayé d'arriver sur ce terrain mouvant. Il y a une différence qui est abyssale entre Tapie et moi. C'est un être amoral. Et sans morale, on ne va nulle part. Lui, il est arrivé de nulle part... et il va y retourner.
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