Comment Jean Fernandez a decouvert Zidane Ribery et Ped
La rédaction

Le 10 Sport Hebdo consacre un dossier aux joueurs repérés par Jean Fernandez. Voici les plus illustres trouvailles de l'entraîneur de l'AJA. Anecdotes savoureuses en prime.

En mobylette avec Coca, chips et copine derrière

« Zidane a été recruté à Cannes grâce à Mr Varraud. C’est lui qui a repéré Zidane. Il l’avait convoqué trois jours en stage à Cannes. Mr Varraud est donc venu me chercher pour que j’aille le voir jouer. Ce jour là, j’étais fatigué, je ne voulais pas y aller, mais comme je respectais ce monsieur, j’ai cédé. Zidane avait 15 ans seulement et pour son essai, il s’entraînait avec la CFA. Je regarde le petit jeu, et puis tout d’un coup ! Je vois le gamin toucher le ballon. J’ai dit à Mr Varraud. Il n’y a pas à hésiter, il faut le faire signer. Il ne touchait pas le ballon comme les autres. Il avait déjà la technique que vous connaissez. Ce qu’il avait dans les pieds était exceptionnel. Donc on l’a gardé. A 16 ans, il s’entraînait avec moi. Au milieu des pros, c’était déjà le meilleur. Et puis le gamin que c’était ! Un état d’esprit fantastique, gentil, respectueux et avec l’envie de réussir. Il a plus travaillé que les autres. Parfois il prenait les ballons tout seul et il allait travailler contre le mur. Ses potes venaient le chercher avec la mobylette : «Tu viens Yazid on va au cinoche». Il y avait la copine derrière, le coca et les chips. Mais Yazid lui, il préférait travailler avec le ballon. Et le jour où il a signé son contrat stagiaire. Je m’en souviendrais toujours. J’ai reçu ses parents dans mon bureau. Ils étaient impressionnés, sa mère était figée et ne disait pas un mot. Ils avaient une immense fierté. Mr Zidane m’a dit : «Vous pensez que mon fils va réussir '» Je lui ai répondu : « ne vous en faites pas Mr Zidane. Votre fils est très fort au football. Mais là où il est encore plus fort, c’est dans sa tête. Vous l’avez très bien éduqué. Il a des qualités humaines largement au-dessus de la moyenne ».

Franck Ribéry. « J’ai dit à son agent : vous ne repartez pas à Brest »

« Un jour, un dirigeant de Metz est venu me voir et m’a dit : « Jean, j’ai vu un extraterrestre. Il s’appelle Franck Ribéry, il joue en National à Brest. » Je me suis renseigné. Personne ne le connaissait. Je suis quand même allé le voir jouer à Raon-l’étape en fin de saison. A la fin du match, j’ai dit à son agent : « vous ne repartez pas à Brest. Je vous invite. Je vous mets au Novotel à Metz et après on discute pour Franck ». J’ai mis Ribéry et son agent dans ma voiture et on est rentré à Metz. J’ai rapidement appelé le président et je lui dis de préparer un contrat. Le lendemain matin, ma femme est allée chercher Wahiba à la gare avec un bouquet de fleur et elle me l’a amené pour continuer les négociations. Les femmes parfois, ça aide ! Et j’ai dit à Franck : « nous on n’a pas d’argent mais moi je vais te donner la possibilité de jouer en Ligue 1. N’en fait pas une affaire d’argent ! » A l’époque, Franck, il n’avait pas un franc sur lui. C’est son agent qui payait les factures. Il signe finalement son contrat chez nous et il me dit : « coach je peux vous poser une question ? Vous pensez que je peux jouer en première division ' » Je lui dit : « ne t’inquiète pas Franck. Pour jouer tu vas jouer. Et plus tu vas jouer, plus tu vas progresser. » Et puis quelques années plus tard, lorsque j’étais à Marseille, Pape Diouf m’appelle et me dit : « Ribéry peut partir de Galatasaray pour zéro ! » Je lui dit : « où il est ? Va le chercher vite ». « Oui mais Marseille, ce n’est pas Metz Jeannot » il me répond. « Va vite le chercher ! A Marseille, ce gamin, demain, il aura le stade à ses pieds »

Benoît Pedretti. « Quand je l’ai connu, il jouait ailier gauche »

Je le connais très bien Benoit. Quand je l’ai connu, il jouait ailier gauche. (Il se lève et va vers le tableau). A mon arrivée à Sochaux, on a fait un listing des joueurs qui pouvait jouer. Entre les espoirs et les pros, il y avait 60 joueurs. Pedretti n’était même pas dans la liste. Un jour je vais voir l’équipe DH jouer dans un village perdu à côté de Sochaux. Je me mets dans la tribune. Il pleuvait des cords. Je m’en souviendrai toujours. Il n’y avait qu’une seule personne dans les tribunes, une dame. C’était Mme Pedretti, sa mère. Parce qu’au moment où personne ne croyait en lui, sa mère était là et elle savait qu’il serait professionnel. Et je vois ce joueur qui jouait ailier gauche, et qui ne ressemblait à rien. Lent ! Droitier ! Je me disais : « mais qu’est ce qu’il fait là ? Qu’est-ce qu’il fait à gauche ' » Et puis tout d’un coup ! Il fait un crochet, il se met sur son pied droit et il enroule un ballon vers la surface de réparation. Le ballon, il part comme une bombe. Un geste qui sort de l’ordinaire. Puis plus tard, un autre bon crochet, (il mime la scène) puis pof ! Une passe. Pof ! Une passe. Une qualité de passe extraordinaire. Je me dis : « ce gamin, il ne doit pas jouer là ! » Je vais voir Stéphane Paille, l’entraîneur de la CFA. Je lui dis : « Pedretti, il doit jouer devant la défense ». Il me répond : « Pffff ! Arrête, il ne sait même pas défendre ». Je lui réponds : « Ne t’occupes pas, fais moi plaisir, au prochain match de la CFA, tu le mets au milieu. » Le match suivant en CFA, il est titulaire. (Il marque un silence)… Il a éclairé le jeu ! Des bonnes passes ! Des diagonales, Des bons déplacements ! Sur le terrain, il y avait lui et les autres. Il ne savait pas vraiment bien défendre mais il avait fait un match énorme. Il a tout de suite été bon. Je lui ai dit : « tu vas venir avec moi. Tu as six mois pour apprendre ton métier. » Je lui ai donné les consignes : « pas un mot ! Tu regardes et tu écoutes, les tauliers et le coach. Et dans six mois on fait le bilan. » Durant ces six mois, il a été le premier à l’entraînement, le dernier parti, le premier au soin, le dernier parti. On lui a expliqué ce qu’était le rôle d’un numéro six. Il n’avait pas un gros volume de jeu mais il voyait les choses plus vite que les autres. La saison suivante, il était titulaire en équipe première.