Didier Deschamps m'impressionne. Pour moi cette saison, il avait plus de chances de se planter que de refaire gagner des titres à l'OM. J'étais inquiet pour lui car il arrivait après Eric Gerets, qui était adulé et qui avait réussi à accrocher la deuxième place. Ce n'était pas un cadeau?
Sauf que Didier Deschamps est intelligent et a du caractère. Il a réussi à convaincre Robert-Louis Dreyfus qu'il fallait effectuer un recrutement important. Peut-être que la maladie de monsieur Dreyfus a favorisé la requête de Didier, comme si le patron voulait faire un dernier beau geste avant de partir, comme un seigneur, en espérant avoir le temps de savourer un titre. Malheureusement, il nous a quitté mais s'il a été aussi généreux à l'intersaison, c'est que l'entraîneur a su le convaincre qu'il ne fallait plus seulement procéder à des retouches, mais qu'il fallait presque reconstruire une équipe. Ce recrutement onéreux mais de qualité a permis à Didier d'avoir un effectif aussi riche que celui de Lyon et certainement meilleur que celui de Bordeaux.
L'assurance des grands Mais je ne suis pas surpris par Didier, car du caractère, il en a toujours eu. Je l'ai vu débarquer en équipe de France à la fin des années 80 avec l'assurance des grands. Pourtant, son jeu n'était pas impressionnant, mais il était déjà très mûr pour son âge. On aurait dit un vieux briscard d'une vingtaine d'années. Son intelligence a été de savoir très vite ce qu'il pouvait ou savait faire sur le terrain, et ce qu'il était incapable de réaliser. Dès lors, il s'est attaché à jouer avec sa tête et son courage, jusqu'à devenir un des meilleurs joueurs du monde à son poste. Je me souviens avoir joué contre lui lorsqu'il était à la Juve avec Zizou, et moi à Parme. J'ai été subjugué par la simplicité de son jeu et son efficacité, sans gestes superflus. Le jeu était fermé d'un côté, il laissait passer le ballon par une feinte de corps et renversait le jeu côté opposé, côté ouvert. Bien sûr, sa principale qualité était son état d'esprit. Un véritable guerrier qui ne lâchait rien, dur dans les duels. Parfois, ses tacles étaient même très limites pour mieux marquer son territoire. Ses entraîneurs en ont tous fait leur capitaine, leur relais sur le terrain. Car Didier savait très bien se comporter en leader, capable de parler aux autres, parfois même en tête-à-tête. Lorsqu'on est irréprochable sur et en dehors du terrain, c'est plus facile de donner des conseils, surtout aux jeunes.
Une nouvelle dimension dans un contexte difficile Aujourd'hui, après une carrière brillante et de l'expérience à revendre, il devient l'entraîneur que l'on soupçonnait. Il s'est construit un parcours solide à Monaco, à la Juve et désormais à l'OM, où il prend une dimension supplémentaire, car le contexte marseillais n'est pas facile. Les journalistes l'aiment bien, mais ils ne leur dit pas grand-chose. Il gère les conflits en interne et sa méthode marche. Je pense qu'il est très bon tactiquement et qu'il possède la personnalité forte de ceux qui ne sont pas là pour faire plaisir, mais pour réussir. Un premier titre depuis 18 ans, c'est merci Didier Deschamps ! En attendant peut-être le second qui lui tend les bras. Alors là, ce sera une statue pour la « Desch » sur la Canebière...