Rugby – Coupe du monde - Damien Chouly : « J’ai encore faim ! »
La rédaction

Capitaine de Clermont, Damien Chouly fait partie des joueurs retenus par Philippe Saint-André pour disputer la Coupe du Monde (18 septembre – 31 octobre). Après une saison dantesque rythmée par deux finales malheureusement perdues, le troisième-ligne rêve de participer à son premier mondial avec le XV de France.

Vous avez connu une préparation physique très rude en vue de cette Coupe du monde. Tout va bien, physiquement et moralement ? Tout va bien très bien, oui. C’est vrai que les trois premières semaines de préparations ont été intensives mais pour prétendre à disputer une Coupe du Monde et être à la hauteur d’un tel événement, c’est un devoir que d’être au top de sa forme physique. Vous vous êtes déjà frotté à une préparation d’une telle intensité ? J’ai connu des préparations costaudes en club mais c’est la première du genre. L’intensité était vraiment forte puisque nous avons eu jusqu’à quatre entraînements par jour. C’était un mélange entre 70% de physique et 30% de rugby, à base de séance de musculation, de fitness et un peu d’entraînement sur le terrain. C’était nouveau pour moi mais nous avions été prévenus par le staff que ce serait une cadence redoutable. Le staff avait déjà annoncé la couleur lors des précédents rassemblements ? Oui, lorsqu’on s’est quitté à la fin du tournoi des 6 Nations, le staff avait déjà parlé de cette préparation. C’était un élément clé pour la suite, une étape indispensable avant de se présenter dans une Coupe du Monde où vous disputez un match tous les quatre jours. Cette préparation, ça aussi été l’occasion pour le groupe de vivre ensemble, créer des liens ? Complètement. C’est vrai que d’habitude, avec l’équipe de France, on se retrouve le lundi pour jouer le samedi. Avec le calendrier infernal des compétitions, nous manquons de temps pour construire et bâtir des choses importantes dans la vie d’une équipe. Là, on a commencé par passer trois semaines non stop ensemble ! C’était génial et ça nous a permis de prendre le temps, d’apprendre à se connaître mieux. Les affinités se créent ou se renforcent, nous avons été mis dans des situations qui ont permis au groupe de se cimenter…

« ON EST BIEN ENSEMBLE, TOUT LE MONDE EST CONCERNÉ »

Comme par exemple ? Nous avons fait pas mal d’activités hors-rugby, lors du stage à Tignes. Nous sommes sortis deux fois en montagne. Une journée, nous avons monté le col de l’Iseran : 18 kilomètres à vélo… Et derrière, randonnée de 2h40 avant de dormir dans un refuge. On a aussi fait de la via ferrata, où il a fallu, pour quelques uns d’entre nous, gérer le stress lié au vertige… C’était riche en émotions ! Est-ce que vous avez-vous découvert un joueur, une personnalité, dans ce groupe ? Quelqu’un qui a particulièrement retenu votre attention ? C’est difficile parce qu’on se connait tous déjà. Quand on n’est pas ensemble en équipe de France, on joue ensemble ou les uns contre les autres le week-end. On se croise très souvent, on parle beaucoup. On est bien ensemble, tout le monde est concerné, c’est parfait. Philippe Saint-André ne sera plus le sélectionneur de l’équipe de France après cette Coupe du Monde. C’est un paramètre à prendre en compte ? On sait effectivement qu’il va être remplacé après ce Mondial et on sait que Guy Novès va prendre la suite de son travail. Tout ça, c’est loin. Le plus important, c’est d’être concentré sur la compétition qui arrive. On parle quand même d’une Coupe du Monde, ce n’est pas rien. On pense principalement à bien se préparer, à faire quelque chose d’exceptionnel ensemble. Avec les joueurs, le sélectionneur. On répond tous présent et il n’y a pas d’autres paramètres qui entrent en ligne de compte. Le sélectionneur ne vous a pas parlé de son départ, de sa succession, durant le rassemblement ? Non, pas du tout. Il a plutôt parlé du présent, de la mentalité et de l’état d’esprit à adopter. Il est conscient, et tous les joueurs le sont, que c’est notre état d’esprit qui fera la différence. C’est primordial. Après plusieurs résultats médiocres, tout le monde nous attend au tournant. Et depuis quatre ans, depuis la finale perdue face à la Nouvelle-Zélande, tout le monde parle du Mondial en Angleterre. Cette fois, on ne parle plus : on y est. Une Coupe du Monde, c’est un rêve. Même quand on s’apprête à la jouer ? Bien sûr que ça reste un rêve… Ce n’est pas donné à tout le monde de vivre un tel événement. J’ai conscience de la chance qui est la mienne. C’est pour cette raison que je suis à 200%. Je n’ai qu’un objectif : jouer et tout donner pour que la France brille et gagne !

« J’AI TENDANCE A ÊTRE RAREMENT SATISFAIT DE CE QUE JE FAIS »

Vous évoluez au plus haut-niveau depuis plus de dix ans. Est-ce que vous êtes encore impressionné, admiratif d’un tel événement ? Est-ce que vous avez peur ? Plus que de la peur, ou de l’appréhension, c’est de l’excitation. Vous vous rendez compte : une Coupe du Monde… Je sais que je n’aurai peut-être pas d’autre occasion d’en disputer. Je mesure la chance que ce pourrait être de faire partie d’une telle aventure. Et je ne veux pas rater ça. Vous allez avoir bientôt 30 ans. A 30 ans, on met toujours un coup d’œil dans le rétroviseur pour voir si ce qu’on a fait en bien. Vous voyez quoi, vous ? J’ai tendance à être rarement satisfait de ce que je fais. En tout cas, de ressentir une plénitude dans ce que j’accomplis. C’est d’ailleurs, je pense, ce qui me pousse à avancer en permanence. Je veux rester au plus haut-niveau et cette insatisfaction m’anime en permanence. Je veux chercher à aller plus loin, encore et encore. J’ai encore faim ! Je veux jouer pour me rapprocher d’une certaine perfection. Autre coup de rétro dans la saison un peu folle disputée avec Clermont, dans un nouveau rôle, celui de capitaine. Quelques mois après, vous avez quel goût en bouche ? Un goût d’inachevé, forcément… On a chuté deux fois en finale, il n’y a rien de plus frustrant. Mais on ne peut pas nier que c’était une année formidable, pleine d’émotion, même si on aurait aimé une autre fin. C’est le résultat d’un beau parcours, d’un groupe extaordinaire. J’ai énormément appris cette saison, la première que je disputais en tant que capitaine. Même la finale a été riche d’enseignements. Vous retenez quoi particulièrement ? L’état d’esprit, principalement. C’est ce qui nous a permis d’avancer, d’aller loin. Encore aujourd’hui, avec l’équipe de France, je sais que c’est notre état d’esprit qui fera la différence. Ce parcours enrichissant avec Clermont en est la preuve. Sur un plan plus personnel, j’ai compris l’importance de la communication. Et avec du recul, je repère les petites choses qu’il faut corriger ou modifier. Des choses que vous modifierez en Angleterre pour ne pas perdre votre troisième finale de l’année ? C’est difficilement comparable car ce n’est pas la même compétition, pas la même équipe. Et le chemin pour y arriver sera long ! Dans tous les cas, seul la gagne et la confiance en nous devront nous animer si nous voulons prétendre à quelque chose de grand… Crédit Photo © JP Loyer / Presswall

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