Gourcuff Chez les Bleus Yoann ne se sent pas a laise
La rédaction

Dans une interview accordée au 10 Sport, Christian Gourcuff revient sur les raisons de l'échec de l'équipe de France à la Coupe du monde. Il évoque aussi le cas de son fils Yoann et nous révèle son mal-être au sein du groupe France.

Christian Gourcuff, quelles sont les raisons de l'échec retentissant de l'équipe de France à la Coupe du monde ? Ça dépasse le cadre technique. On ne peut pas nier les valeurs collectives qui sont l'essence même du football. Cela nécessite des notions d'intelligence, de comportement, d'humilité. Tout ce qui fait aujourd'hui défaut à l'équipe de France. L'individualisme à outrance nie ces valeurs et cela se répercute sur le jeu et les résultats. Depuis l'Euro 2008, on marche à l'envers.

Vous voulez dire que l'équipe de France est une équipe composée d'individualités incapables de se mettre au service du collectif ? On a vu la différence avec le Mexique. Les Mexicains ne sont pas des super joueurs. Ils sont même vraisemblablement inférieurs aux Français sur le plan technique et physique. Mais la simplicité et l'application qu'ils ont mis dans leur jeu tranchait littéralement avec la cacophonie française. Les Français ont joué par à coups, en essayant uniquement de faire la différence individuellement. On ne retrouve pas les notions de partage, de solidarité, de plaisir de jouer. Aujourd'hui, il y a deux types de joueurs. Ceux comme Cristiano Ronaldo, qui vont d'abord provoquer, chercher la solution individuelle, avant de passer par le collectif. Et il y a ceux comme Lionel Messi qui vont d'abord chercher la solution collective avant de faire la différence individuellement. Les Français ont opté pour la première démarche, qui n'est, selon moi, pas la bonne. Le problème aussi, c'est que les joueurs comme Ronaldo sont médiatiquement valorisés et que les nouveaux joueurs s'identifient à eux. Avec ce phénomène de starification, on perd les valeurs du football qui reposent sur le collectif. On ne juge pas un joueur seulement à travers ses statistiques individuelles.

Le malaise du football français est donc bien plus profond. La politique sportive mise en place par la DTN en est-elle une des causes ? Toute la politique de la DTN n'est pas mauvaise. Mais en se focalisant sur le déploiement des qualités de l'individu, avec une prédominance de l'aspect physique, on ne raisonne pas de la bonne manière. Aujourd'hui, on développe l'individu pour après l'incorporer dans le collectif. On a tout faux. C'est marcher à l'envers. Il faut favoriser l'épanouissement de l'individu à travers le collectif.

Quel est le sentiment de votre fils, Yoann, après cette défaite face au Mexique ? Je ne l'ai pas eu au téléphone mais j'imagine déçu, très triste. Depuis trois jours et avec les mises en place à l'entraînement, il savait qu'il n'allait pas jouer. Pour sa première Coupe du monde, ça devait être un grand moment et ça se termine en eau de boudin. Parce que sincèrement, là, c'est foutu.

On a l'impression qu'il ne trouve pas sa place en équipe de France, qu'il ne s'y sent pas à l'aise... Oui, c'est vrai, il ne se sent pas à l'aise. Il ne prend pas de plaisir dans cette équipe. Collectivement, c'est difficile d'en trouver. Contre le Costa Rica il en a pris, parce que pour une fois l'équipe de France a joué en équipe. Mais quand je vois l'attitude de certains joueurs avec lui contre l'Uruguay... En équipe de France, dans le cas de Yoann, ça dépasse le cadre du foot.

Propos recueillis par Antoine Simonneau