Gourcuff : les raisons de son passage à vide
La rédaction

Parti à 19 ans au Milan AC, considéré comme l'un des grands espoirs du foot français, Yoann Gourcuff erre comme une âme en peine sur les rectangles verts depuis un an. Les spécialistes du football français expliquent pourquoi.

Le délicat contexte lyonnais
Où est donc passé le Gourcuff de Bordeaux, cru 2008-09, virtuose décisif capable de faire basculer une rencontre à lui tout seul ? En un an, il est passé du statut de star à celui d’«anonyme» de la Ligue 1. Et pour beaucoup d’observateurs, son enlisement ne s’est pas arrangé en rejoignant les rangs de l’Olympique Lyonnais. « Les grands joueurs s’expriment dans les grandes équipes et Lyon est un club en difficulté, analyse Christophe Lollichon, un de ses anciens formateurs à Rennes, aujourd'hui entraîneur des gardiens de Chelsea. S’il avait débarqué dans le Lyon qu’on a connu pendant 7 ans, il n’aurait aucun problème aujourd’hui. »

Un mental défaillant ?
La traversée du désert de Yoann Gourcuff interpelle également sur sa capacité à surmonter les épreuves. C’est dans ces contextes là qu’on reconnaît aussi les grands joueurs. « Depuis plus d’un an, son visage n’est plus éclairé, remarque Olivier Rouyer, ancien international, consultant pour Canal+. Gourcuff est fermé, très introverti. A Bordeaux, on sentait quelqu’un d’heureux, de bien dans sa peau. Il y a un mal-être et quand on n’est pas bien, ça se ressent dans notre activité professionnelle. » Un cercle viceux où face à ses doutes, l’international français ne trouve pas la clé et s’enfonce un peu plus dans ses incertitudes. 

A trop vouloir en faire, il se perdDésarçonné, en perte de repères, le milieu lyonnais essaye à tout prix de retrouver ses sensations perdues. Pour y parvenir, à l’image de Gignac à l’OM, il multiplie les courses, couvre beaucoup de terrain et finit par se disperser et perdre en efficacité. « Il doute et veut à tout prix faire le geste décisif. Il a envie de montrer à ceux qui portent des jugements qu’ils se trompent », assure Claude Le Roy. « Il est hanté par ses souvenirs, affirme Jean-Michel Larqué. Il ressasse les roulettes, les double-contacts... qu’il réussissait avant mais qu’il n’arrive plus à reproduire. Quand on a réussi des gestes exceptionnels et qu’on voit qu’on arrive plus à les refaire, c’est terrible pour un joueur. »

Le poids des comparaisons
Les médias ne sont donc pas non plus exempts de tout reproche face à l’apathie de Gourcuff depuis des mois. Au sortir de son exceptionnelle saison avec Bordeaux, les éloges et les superlatifs pleuvent. Dans sa quête perpétuelle d’icônes, la presse a enfin trouvé le successeur de Zidane et Platini. Celui qui saura ramener l’équipe de France vers les sommets. « On est tombé dans l’hystérie par rapport à ce qu’il avait fait », soutient Claude Le Roy. Un nouveau statut, une pression populaire et une obligation de performances que Gourcuff n’a pas su gérer. Un rang à tenir arrivé trop vite, trop tôt, pour un garçon très réservé. « Le danger des comparaisons, c’est qu’on les fait avec des joueurs comme Zidane ou Platini au moment de l’apogée de leur carrière, constate Landry Chauvin, l'entraîneur sedanais, un de ses anciens formateurs à Rennes. Où en étaient-ils à 24 ans ? En 1996, ce n’était pas le Zidane de 1998 et encore moins celui de 2000. »