Plongee choc chez les independants
La rédaction

Le 10 Sport Hebdo a rencontré un des supporters indépendants du PSG. Il nous raconte le chemin de violence emprunté par les siens. Un témoignage choc à retrouver dans l'édition de ce vendredi 6 novembre. Le10sport.com vous en offre quelques extraits.

On lui donnerait le bon Dieu sans confession. Costume cintré, mallette noire de travailleur, poignéede main franche, sourire enjôleur, discours intelligible. Anthony* ne ressemble en rien à l'imagerie populaire du hooligan. 31 ans, chef de projet dans une agence de communication parisienne, marié, un enfant. Un profil de gendre idéal. Et pourtant. Anthony fait partie de la frange des supporters « indépendants » du PSG. Une bande de hooligans à la française spécialisés dans les « fights » sauvages avec leurs homologues d'autres clubs. Leur truc ? Se battre. Par passion. Comme un passe-temps. Au nom d'une logique hallucinante de bêtise. « Quand vous voulez vous détendre de votre semaine de travail, le weekend, vous allez boire un petit verre, non ? Ça fait de vous un alcoolique ? Non. Moi, c'est pareil. Sauf que je vais me détendre en me battant. Je me défoule physiquement. Est-ce que ça fait de moi un meurtrier pour autant. » Ecrire ces lignes nous fait froid dans le dos. Et pose le débat. Mais qui sont ces indépendants ? Pour la plupart, des Monsieur Tout-le-Monde insoupçonnables.

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Descentes en province, batailles rangées sur le parking d'un supermarché ou sur une aire d'autoroute, caillassages de bus, dégradations, poursuites dans les tribunes, Anthony et ses « copains » ont plusieurs cordes à leur arc. Avec une préférence pour les fights, ces bagarres organisées entre bandes. « C'est ce qui me fait bander. Un groupe, un autre en face, on se retrouve, on se bat et on s'en va ! On a des règles. On ne s'acharne pas à plusieurs sur quelqu'un. On ne frappe pas à la tête un homme à terre. Il y a une forme de respect entre nous. Même si on est là pour les fracasser et défendre l'honneur de la capitale en territoire ennemi ! » Une forme de hooliganisme à l'anglaise qui échappe aux forces de l'ordre.

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Loin d'être des brutes stupides, les indépendants savent s'organiser. « On utilise beaucoup Internet. On ne s'appelle jamais sur nos portables. La plupart, je n'ai même pas leur numéro. Il y a des forums spécialisés sur lesquels on peut échanger des informations. Mais on sait que certains sont surveillés, donc on laisse des fausses pistes pour piéger les flics. On passe aussi par des sites plus grand public pour échanger des informations. On va sur le forum, on crée un post sur un tout autre sujet, par exemple les jeux vidéo, et au bout de quelques réponses on commence à parler de ce qui nous intéresse vraiment. Grâce à tout ça, on peut se donner des rendez-vous très précis avec les indés des autres clubs. » Des techniques proches de celles des dealers. Pour recueillir le témoignage d'Anthony, connaissance d'une connaissance, il a ainsi fallu attendre son appel masqué sur notre portable. Pas question de refiler son numéro à un journaliste, corporation bien trop acoquinée avec les uniformes bleus. Anthony enregistrera même notre conversation sur un dictaphone ! « Quand les flics savent qu'on va dans une ville mais qu'on leur échappe, c'est un plaisir. On les fait tourner en bourrique ! »

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Quelques centaines d'ombres insaisissables qui échappent à l'enclos sécuritaire des déplacements officiels. Pas même déçus de ne pas assister au match. Plus fans de la violence que du football. « Je suis allé à Marseille zen voiture avec trois copains. J'étais le seul à avoir un ticket pour le match, les autres s'en foutaient. Des Marseillais nous attendaient pour se battre et on était là pour ça. Annulation ou pas, il y aurait eu des incidents. »

*Prénom modifié à sa demande

L'opinion de Philippe Broussard, rédacteur en chef du service enquête de L'Express, auteur de Génération supporter et spécialiste du mouvement hooligan :

Quel est le leitmotiv de ces supporters indépendants ?

« La difficulté est de ne pas tomber dans la caricature. La première serait de dire : ils sont tous violents, ils sont tous stupides. C'est beaucoup plus compliqué que ça et même effrayant, car il y a une froideur et parfois une lucidité dans la manière dont ils planifient les choses qui sont inquiétantes. Leur conception du boulot de supporter est de dire : "On est arrivé jusqu'au coeur de votre territoire". C'est un peu la hooligan attitude. On se crée des frissons, une poussée d'adrénaline, on vit un truc fort en commun avec les copains. »