OM : Anigo, entre mythes et réalité
La rédaction

Le directeur sportif de l'OM a toujours traîné une réputation sulfureuse et le dernier feuilleton n'a rien arrangé à l'affaire. Décryptage d’une légende.

« J'ai dit aux supporters qu'il fallait casser le stade et égorger l'entraîneur ! ». La phrase est authentique. Et elle est de... José Anigo, en personne ! Mais que l'entreprise chargée de la rénovation du Vélodrome et Didier Deschamps se rassurent, ce n'était évidemment qu'une galéjade, lancée le soir du 22 octobre, lors de son fameux coup de gueule. Pourtant, elle résume assez bien la rumeur qui circule depuis un certain temps : le responsable des relations avec les supporters noyauterait et manipulerait les différents groupes à des fins « politiques ». Pour Ludo, 28 ans, membre des Ultras, pas de doute : « Qu'il laisse Deschamps travailler tranquille ! On a beau le critiquer, depuis son retour, l'OM a raflé cinq titres ! ». Selon Jo, 38 ans, abonné en tribune Jean-Bouin depuis 1989, le problème est chronique : « Ce que j'ai du mal à comprendre, c'est que le directeur sportif, à l'OM, a plus un rôle de 'coordinateur des réseaux marseillais' que de véritable manager. Aujourd'hui, c'est Anigo, mais on a eu Dib, Di Méco ou Cano dans le passé… On ne sait jamais vraiment à quoi ils servent ces gens-là. »

 « Ca n’est pas un voyou »

Bernard Rodriguez, ancien pro à Toulon et aujourd'hui entraîneur, connaît bien et José Anigo (les deux hommes ont évolué ensemble sous le maillot de Cassis en 1992-1993). « On en fait des tonnes… Mais à l'OM, ça fait partie du job ! Tu es obligé d'avoir un gars de ce profil dans l'organigramme pour composer avec les spécificités locales. Cela ne fait pas pour autant de José un comploteur ou un voyou, souligne l'ancien coach du FC Istres (en 2006). Je rappelle au passage qu'il n'a fait que répondre, à sa manière certes, et avec des termes politiquement incorrects, aux insinuations de Didier Deschamps ! Et pour moi, cette première attaque de DD, elle était tout sauf gratuite… »

 Le pacificateur

Jean-Louis, habitué du virage nord, va encore plus loin. Pour lui, Anigo serait même un... pacificateur ! « On dit qu'il savonne la planche de Deschamps, mais s'il n'avait pas été là, ça aurait pété depuis un moment déjà avec les joueurs ! Moi, ça fait 40 ans que je suis l'OM et j'ai vu bien pire ! C'est pas deux ou trois banderoles qui vont les effrayer, non ? Les supporters sont même devenus trop gentils à mon sens. Il fut un temps où on n'aurait pas attendu trois mois avant de réagir. » Abédi Pelé, gloire olympienne des années 90 et père comblé des frères Ayew, confirme : « A notre époque, les supporters étaient plus sévères et cassaient tout quand ils n'étaient pas contents. Je ne dis pas que c'était mieux, mais ça nous poussait et c'est aussi pour ça qu'on a gagné beaucoup de titres. » 

 Une vie après l'OM ?

Bon, admettons qu'il n'y ait jamais eu volonté de nuire de la part de José Anigo... A-t-il la stature d'un grand directeur sportif pour autant ? « Une chose est sûre, même si on peut lui reprocher parfois ses méthodes et son style de jeu, les grosses pointures signent à l'OM pour travailler avec Deschamps, pas pour Anigo », fait remarquer Jo. « Oui, mais si c'est pour s'entêter à faire jouer le fantôme de Lucho pendant des mois... », répond Jean-Louis en écho.

Au final, difficile d'envisager une saine collaboration dans les semaines à venir... « Nous, on est pour la paix des ménages, clame Renaud, 25 ans, adhérent des Fanatics. Alors, que chacun fasse son boulot et qu'ils arrêtent de salir l'image du club en s'étripant en public. C'est tout ce qu'on leur demande. » Bernard Rodriguez, lui, se veut plus sibyllin : « Il finira la saison, c'est sûr, Vincent Labrune a encore besoin de lui. Après… ». Un départ de l'ancien Minot n'est pas à exclure : « C'est vrai qu'il véhicule une image à forte identité marseillaise. Mais son destin n'est pas forcément lié à vie à celui de l'OM. Je pense qu'aujourd'hui, il a acquis les compétences nécessaires pour s'épanouir ailleurs. Et je sais qu'à une période, il avait même eu des contacts à l'étranger. » Notre petit doigt nous a même soufflé le nom de quelques pays du Golfe...

Par Gilles Bertuzzi, à Marseille

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